Pendant plus de trois ans, la victime du proxénète Serge Murenzi a été contrainte de danser nue dans des bars de Montréal, terrorisée par cet homme qui la battait pour « tout et rien » et contrôlait toute sa vie. « J'ai longtemps cru que Serge Murenzi allait me tuer », a-t-elle confié, alors que la Couronne a réclamé hier une peine de six ans de pénitencier.

« Serge Murenzi m'a détruite psychologiquement. J'ai été manipulée et brainwashée tout au long de ma relation. Il me battait, il me dénigrait, m'insultait. [...] C'est comme si j'avais été dans une secte. Cet homme a hypothéqué ma vie, j'ai dû consommer pour passer au travers de l'enfer qu'il m'a fait vivre », a raconté la victime dans une déclaration lue par la procureure de la Couronne Louise Blais.

Serge Murenzi a été reconnu coupable en avril dernier par la juge Mylène Grégoire de traite des personnes, de proxénétisme et de voies de fait causant des lésions. Pendant trois ans, le proxénète a eu le contrôle absolu de la vie de sa victime, tombée « en amour par-dessus la tête » avec lui en 2010.

Le proxénète exigeait une récolte de 3500 $ par semaine à sa victime et la battait si elle obtenait moins. Il lui a confisqué son passeport et ses pièces d'identité et a contrôlé sa vie jusqu'à lui dicter l'heure de sa douche. « Plus que j'argumentais, plus il devenait violent. Plus il devenait violent, plus j'étais maganée. Plus j'étais maganée, moins je travaillais. Moins je faisais de l'argent, plus je mangeais de volées », a-t-elle témoigné au procès.

La jeune femme évalue avoir remis 185 000 $ à Serge Murenzi. « Cet homme a hypothéqué ma vie, j'ai dû consommer pour passer au travers de l'enfer qu'il m'a fait vivre. J'ai connu les bas de fonds », explique-t-elle dans sa lettre. Deux ans plus tard, elle peine toujours à s'en remettre et souffre d'un trouble de stress post-traumatique. « Je voudrais tant que tout ce bout de ma vie soit enrayé, n'être plus traumatisée par ce que j'ai subi, que cette expérience cesse de me hanter », raconte-t-elle.

Serge Murenzi affiche un manque d'empathie et un risque de récidive élevé, a relevé la Couronne dans le rapport présentenciel. « M. Murenzi a commis un crime d'une gravité importante sur une période très longue. La violence et le contrôle étaient continuels. Il l'a traitée comment, sa victime ? Elle vous l'a dit : "Comme un chien" », a plaidé hier Me Blais.

Serge Murenzi nie toujours avoir commis ces crimes, a répété hier son avocate Me Vicky Powell en demandant l'imposition d'une peine de deux ans et demi de détention. L'avocate fait valoir qu'il y a eu des « périodes d'arrêt » durant la période des crimes. De plus, elle relève une différence entre la « prostitution complète dans des hôtels » et des « danses contact » avec des « extras », comme dans le cas présent.

Me Powell a souligné que Serge Murenzi était toujours protégé par son statut de réfugié au Canada, alors que toute sa famille a perdu la vie pendant le génocide rwandais. Un représentant de la diaspora rwandaise a déposé une lettre à la cour indiquant que Serge Murenzi était un « membre actif de la communauté ».

La juge rendra sa décision le 25 octobre.