Le juge François Huot souhaite entendre les avocats d'Alexandre Bissonnette, qui doivent plaider aujourd'hui que l'article du Code criminel qui lui permet d'imposer des peines consécutives pour les meurtres de six Québécois de confession musulmane, en janvier 2017, est inconstitutionnel.

Si le juge tranchait pour des peines consécutives au terme du procès, l'auteur de l'attentat à la mosquée de Québec ne pourrait pas demander une libération conditionnelle avant 150 ans. Ses avocats souhaitent qu'il puisse le faire après 25 ans, comme cela est prévu lorsqu'une personne est condamnée à la prison à perpétuité.

Mardi, au palais de justice de Québec, le procureur de la Couronne, Me Thomas Jacques, a livré un long plaidoyer pour que M. Bissonnette soit condamné à des peines consécutives, ce qui est permis par l'article 745.51 du Code criminel canadien depuis 2011. 

Pour ce faire, le juge Huot doit évaluer le caractère du délinquant, la nature de l'infraction qu'il a commise, ainsi que les circonstances l'entourant, a expliqué Me Jacques. 

« [Son] crime a eu un impact et des répercussions majeures non seulement sur les victimes, mais sur [toute] la communauté. Sur la ville. Sur la province. Sur le pays. C'est un crime qui a eu des répercussions planétaires », a souligné le procureur de la Couronne.

« Il s'agit d'un oeil au beurre noir. D'une cicatrice sur les valeurs protégées par la société canadienne (...). Ces répercussions s'assimilent à celles du crime de terrorisme. Le crime commis ne comporte pas les éléments constitutifs du crime de terrorisme, mais ses répercussions sont les mêmes », a plaidé Me Jacques. 

Une question de confiance

S'adressant au juge Huot, le représentant du ministère public a demandé : « pouvez-vous lui faire confiance ? » 

« Alexandre Bissonnette est un individu narcissique dont tous les experts ont reconnu la capacité d'empathie très limitée envers ses victimes », a dit Me Jacques dans la première partie de sa plaidoirie, mardi.

Alors que l'avocat résumait à la cour les différents éléments de preuve qu'il jugeait essentiels pour que le juge Huot prenne une décision, l'atmosphère dans la salle d'audience était lourde. Assis derrière une paroi vitrée, Alexandre Bissonnette - habillé d'une chemise bleue, le visage tourné vers le sol - a pleuré à quelques reprises. Dans la salle d'audience, des familles de victimes ont également étouffé plusieurs sanglots.  

« Les crimes commis par Alexandre Bissonnette ont été longuement prémédités et planifiés », a insisté Me Jacques. 

Le soir de la tuerie, a-t-il rappelé, M. Bisonnette ne s'est pas laissé démonter lorsqu'une première arme qu'il avait à sa disposition s'est possiblement enrayée, l'empêchant de l'utiliser. 

« Il choisira plutôt de faire preuve d'une cruauté sans bornes. Il sourira à ses victimes pour leur faire croire qu'il s'agissait d'une farce, avant de les exécuter froidement. Il [a pris] la peine de sourire pour maintenir un brin d'espoir », a dit Me Jacques. 

« Après ce geste abject, [Alexandre Bissonnette] débutera l'exécution de ce plan odieux de tuer des gens, de faire le plus de victimes possibles, de déferler sa haine et sa rage dans le but de se glorifier », a-t-il conclu.

Alexandre Bissonnette sera de retour au palais de justice de Québec, aujourd'hui, alors que la requête sur la constitutionnalité de lui imposer des peines consécutives pour les meurtres qu'il a commis se poursuit.