Battu à mort pour quelques grammes de tabac, Michel Barrette a subi « la loi des hors-la-loi » de la prison de Bordeaux : Tarik Biji, Garmy Guerrier et Jason Côté. Pour leur crime « odieux », « violent, crapuleux, lâche et gratuit », les trois ténors d'un comité de détenus ont écopé hier de peines « exemplaires ».

« La loi des hors-la-loi : l'omerta, la loi du silence. Voici les deux règles non écrites bien ancrées en centre de détention. Michel Barrette en a été la victime. » C'est avec cette formule-choc que la juge Hélène di Salvo a amorcé la lecture de sa décision très sévère à l'égard des trois accusés hier, plus de deux semaines après le verdict du jury au terme de 11 jours de délibérations.

Reconnu coupable de meurtre au second degré, le représentant du comité de détenus Tarik Biji a été condamné hier à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans. Dans le box des accusés, le père de famille de 40 ans a esquissé un sourire en direction de sa mère. Le procureur de la Couronne Louis Bouthillier demandait une période d'inadmissibilité de 15 ans, contre 10 ans pour son avocat Gary Martin.

Ses complices lors du passage à tabac de Michel Barrette, le 21 juin 2016, Garmy Guerrier et Jason Côté, ont reçu une peine sévère de 15 ans de pénitencier, dont il leur reste environ 12 ans et demi à purger. La juge a noté l'« insouciance » et la « désinvolture » des deux hommes au lourd passé criminel, notant les « fist bumps » de Garmy Guerrier captés par la caméra de surveillance.

Pour quelques grammes de tabac

L'homme de 46 ans a été roué de coups pendant une vingtaine de minutes par au moins cinq codétenus dans la cellule de Tarik Biji, loin du regard des agents correctionnels. Les trois hommes et leurs complices voulaient faire main basse sur les quelques grammes de tabac de la victime qu'ils ont laissée agoniser sur son lit pendant plus de deux heures. Mort d'une hémorragie interne de la rate, Michel Barrette avait le sternum cassé, de même que pratiquement toutes les côtes.

La juge n'a trouvé aucun facteur atténuant pour l'imposition de la peine, seulement une longue série de facteurs aggravants, le plus grave étant la commission du crime dans une prison. « Il s'agit de la plus grande démonstration de mépris envers la justice, le système carcéral et l'autorité. Si pour les détenus cette violence au centre de détention est tolérée et tolérable, ils ne peuvent demander à la société d'adopter cette même position », a-t-elle soutenu.

La juge n'a pas mâché ses mots à l'endroit du puissant comité de détenus, dont la mainmise sur la prison, tolérée par la direction, s'est retrouvée au coeur du procès. « Le comité n'est pas un mythe. Les membres s'arrogent de manière surprenante un pouvoir sur le secteur et les détenus. Ils contrôlent le trafic, notamment de tabac, de drogue et de cellulaires. Ces trafics sont [pour eux] extrêmement rentables », a affirmé la juge di Salvo.

Photo La Presse

La victime, Michel Barrette

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Jason Côté