Yves Nadeau a-t-il la capacité de comprendre ce qui a causé la mort de sa conjointe, le 24 février 2014? Et réalise-t-il qu'il est accusé du meurtre de Louise Girard ?

Jeudi, c'était au tour de l'accusé de témoigner devant le juge Mario Longpré, dans le cadre de son procès pour meurtre non prémédité au palais de justice de Montréal. Or, Nadeau n'était pas à la barre pour se défendre d'avoir causé la mort de son amoureuse, en la poignardant, dans leur appartement, c'est plutôt son état mental qui a été exposé à la cour lors de son témoignage. Un témoignage pour le moins laborieux.

L'interrogatoire a donc porté sur les évènements suivants immédiatement le drame: l'arrivée des premiers répondants à l'interrogatoire au centre de détention, en passant par l'arrestation. 

Le juge a d'abord posé des questions simples à l'accusé.

«Vous savez ce que signifie prêter serment ? Dire la vérité ? Jurer sur la bible ?

«Je sais pas, monsieur le juge, j'suis pas instruit» a répondu Nadeau, les bras bien droits au long du corps. 

Yves Nadeau a aussi avoué avoir de sérieux problèmes de mémoire. La seule chose dont il se souvient clairement, c'est de la douleur ressentie, lorsque la police lui a enfilé les menottes. «Ça faisait mal!»

L'homme de 59 ans ne souvient pas si les policiers étaient deux femmes; si on lui a fait prendre connaissance de ses droits en l'arrêtant; ni d'avoir parlé à un avocat et d'avoir subi un interrogatoire de plus de deux heures.

«Vous voulez me piéger»

L'accusé a répété que sa conjointe était souvent malade et qu'elle faisait de nombreuses chutes. Il se souvient que Louise Girard était au sol inconsciente (Nadeau a lui-même fait l'appel au 911), mais il croit toujours sa mort accidentelle. 

«Saviez-vous que la police pensait que vous aviez tué Louise?», lui a demandé la procureure de la Couronne. Yves Nadeau s'est subitement crispé. Le juge l'a alors autorisé à s'asseoir pour poursuivre son témoignage. Son avocat, Me Latour, est allé lui chercher une chaise dans la salle.

«Vous êtes là pour me piéger», a lancé Nadeau.

«Que voulez-vous dire ?» a rétorqué la procureure Perreault. 

«M'obliger à dire des affaires que je ne veux pas dire».

À la fin de son témoignage, Yves Nadeau a tranquillement remplacé la chaise qu'on lui avait prêtée. Il est allé rejoindre sa mère de 85 ans dans la salle. 

En plus de faire témoigner son client, Me Latour a aussi appelé à la barre un psychologue pour évaluer l'état mental de Yves Nadeau. Selon ce psychologue, le QI de l'accusé oscille entre 45 et 50, une déficience intellectuelle «modérée», dans une échelle allant de légère à profonde.

Le juge devra décider si la déficience mentale de l'accusé est compatible avoir avec ses droits de faire une déclaration libre et volontaire à la police. Dans le cas contraire, l'avocat de la défense pourrait demander que l'interrogatoire vidéo de son client soit retiré de la preuve.  

Le procès se poursuit vendredi.

- Avec Louis-Samuel Perron, La Presse