Phénomène rare dans une cause criminelle: la soeur d'une victime de meurtre témoigne en faveur de la libération sous caution de l'accusé.

Il faut dire que l'affaire en soi est exceptionnelle. Il s'agit d'un meurtre par compassion selon la défense.

Michel Cadotte, 55 ans, est accusé d'avoir tué Jocelyne Lizotte - sa conjointe souffrant d'Alzheimer - dans un CHSLD, en février dernier.

Ce mercredi matin, au moment de l'enquête sur remise en liberté au palais de justice de Montréal, Johanne Lizotte - soeur de la victime - a décrit son beau-frère Michel Cadotte comme un homme «attentionné» qui avait «juste de l'amour» pour sa femme Jocelyne et qui n'aurait «jamais perdu patience» envers elle.

Mme Lizotte est en faveur de la libération de son beau-frère d'ici à son procès. Or, la poursuite s'y oppose car elle croit que cela minerait la confiance du public en l'administration de la justice. 

Jocelyne Lizotte souffrait de démence précoce et d'Alzheimer à un stade avancé. Elle était hébergée au CHSLD Émilie-Gamelin depuis janvier 2014. Elle a été trouvée morte en début d'après-midi, le 20 février dernier. Son conjoint, Michel Cadotte, a été arrêté sur les lieux. Il avait posté un message sur Facebook à 12h56, disant ceci: «J'ai craquer persone m'a demander coment je vais mes la vous le savez j'ai consenti à sa demande aide à mourir j attent le policier.»

Johanne Lizotte a visité sa soeur pour la dernière fois environ un an avant sa mort. Jocelyne était assise dans un fauteuil gériatrique - sous contention. «Elle ne m'a pas reconnue. On n'a même pas eu de contact visuel», a-t-elle décrit au tribunal. «Je me suis dit: "Mon Dieu, elle a juste 60 ans et son coeur est encore bon. Combien de temps va-t-elle vivre comme ça? J'espère qu'elle va partir le plus vite possible. Elle n'a plus aucune qualité de vie"», a-t-elle poursuivi.

Alors qu'elle s'enfonçait dans la maladie, Jocelyne avait confié à sa soeur qu'elle aimerait mieux mourir que de se retrouver dans un CHSLD. Toutes deux ont vu leur mère - aussi atteinte d'Alzheimer - dépérir de cette maladie dégénérative jusqu'à son décès en 2005.

France Cadotte, la soeur de l'accusé, a aussi témoigné en faveur de la libération de M. Cadotte. «Michel l'a vraiment gardée à la maison le plus longtemps qu'il pouvait», a décrit la soeur de l'accusé. Il aurait même perdu deux emplois car sa femme - laissée seule à la maison et de plus en plus confuse - lui aurait téléphoné à de trop nombreuses reprises au travail. 

Une fois, Jocelyne avait été retrouvée dehors - complètement désorientée - par un voisin, a témoigné Mme Cadotte. Cette dernière est prête à s'engager pour un montant de 10 000 $, soit la totalité de ses économies - pour que son frère soit libéré. Elle dit que son frère a un urgent besoin de consulter un psychologue. «C'est un geste - en parlant du meurtre - avec lequel il vit très durement», a dit Mme Cadotte.

Michel Cadotte est défendu par Me Elfriede Duclervil et Nicolas Welt. L'audience - qui se déroule devant le juge Michel Pennou - se poursuit cet après-midi.