Charles Huneault, considéré par la police comme un prêteur d'argent lié aux Hells Angels, et quatre autres individus ont été libérés ce matin des accusations de gangstérisme et de fraudes fiscales qui pesaient sur eux, en vertu de l'arrêt Jordan, qui limite les délais des procédures judiciaires.

Le juge Daniel Bédard de la Cour du Québec a rendu sa décision en quelques minutes ce matin, et fera connaître ses motifs écrits plus tard cet été.

Huneault et les autres accusés, les propriétaires et deux employés du Centre d'encaissement de chèques et de prêt d'argent Arylo-Malgraf de Laval, Jean-François Thibault, son frère Gérard, Michelle Lemyre et Alain Giroux, avaient été arrêtés avec une douzaine d'autres personnes dans une enquête baptisée Hantise et menée par les enquêteurs de la Section des enquêtes sur la criminalité financière organisée de la Sûreté du Québec.

Outre les chefs de gangstérisme et de fraude envers Revenu Québec, Charles Huneault et les quatre autres personnes étaient accusés de complot, recyclage des produits de la criminalité et vol de plus de 5000 $.

Lors de l'annonce de la frappe, la police avait estimé que les suspects auraient échangé une somme de quelque 190 millions en chèques durant l'enquête Hantise, qui a duré deux ans, et que la fraude se serait élevée à au moins 23 millions.

Théorie mise à mal

«Les clients sont satisfaits. Ils avaient une défense à faire valoir, mais c'est un gros poids qui vient de partir de leurs épaules», affirme Me Nicholas St-Jacques, avocat de Gérard Thibault.

«Ce qui est dommage pour nos clients, c'est que Jordan était le moins bon de nos arguments. Ils s'en seraient sortis non pas sur un argument de forme, mais sur un argument de fond. Les accusations étaient basées sur une théorie inédite de complicité du centre d'encaissement qui, pour nous, n'avait pas de sens. Aucune des conversations interceptées durant l'enquête ne prouvait quoi que ce soit», a renchéri son collègue, l'avocat de Jean-François Thibault, Me Alexandre Bergevin.

Dans une requête en arrêt des procédures déposée au début mai, la défense résume ainsi la théorie de la poursuite: les centres Arylo et Gestion Malgraf auraient aidé leur clientèle à se soustraire à leur obligation fiscale, et auraient pris part à un stratagème frauduleux, en toute connaissance de cause ou en faisant de l'aveuglement volontaire.

C'est toutefois en réponse à une autre requête en arrêt des procédures en vertu de Jordan que le juge Bédard a rendu sa décision ce matin.

L'arrêt Jordan, rendu par la Cour Suprême à l'été 2016, fixe à un an et demi la limite des procédures devant la Cour du Québec.

La défense affirme que des délais de 24 mois sont attribuables à la poursuite, en raison d'un manque de préparation. Elle arguait que le procès des accusés, qui avait été fixé pour janvier 2019, aurait pris fin 53 mois et 11 jours après leur arrestation, s'il avait eu lieu.

De son côté, la poursuite s'est refusée à tout commentaire, préférant attendre les arguments écrits. Plusieurs enquêteurs présents dans la salle l'ont quittée l'air abattu après l'audience.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le (514) 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse