Un ancien diplomate canadien en Guinée a été reconnu coupable hier par un tribunal de ce pays du viol d'une fillette de 12 ans survenu à sa résidence en 2015, un crime qu'il nie avoir commis.

Jean Laprade, un homme d'affaires québécois qui occupait le poste de consul honoraire du Canada en Guinée, a été condamné à 12 ans de prison et à près de 22 000 $ canadiens d'amende par le tribunal de première instance de Dixinn. Le tribunal a aussi lancé un mandat d'arrêt contre lui.

Jean Laprade a quitté la Guinée avant le début du procès et est rentré au Québec. Il n'a pas répondu à notre demande d'entrevue, hier. Il avait décliné notre demande la semaine dernière, en affirmant : «Non, je n'ai pas de commentaire à faire, monsieur. Ça, ce sont des histoires, et ce sera traité comme des histoires.»

En entrevue, l'avocat montréalais Julius Grey rappelle que le Canada n'a pas de juridiction sur les crimes commis à l'étranger. «On ne peut pas avoir un procès ici», dit-il.

Le Canada n'a pas non plus de traité d'extradition avec la Guinée. Et les raisons sont claires, note Me Grey.

«C'est que nous ne pouvons pas être certains que leur système judiciaire et leurs prisons sont d'une qualité suffisante pour envoyer quelqu'un devant eux. Il y a de grands dangers que l'on fabrique une accusation si on veut avoir quelqu'un. Sinon, des pays comme la Chine et l'Arabie saoudite pourraient demander le retour d'une personne.»

Hier, l'ancien gardien de Jean Laprade, Aliou Sané, détenu depuis le 10 avril 2015, a été reconnu coupable de complicité de viol. Il a été condamné à 10 ans de prison.

Expertise

Durant le procès, le procureur a déclaré que le 25 février 2015, une fillette vendeuse de bananes âgée de 12 ans à l'époque, désignée sous le pseudonyme de FC, avait été invitée par Aliou Sané à venir vendre ses bananes à son patron.

«Habituellement, c'est le gardien qui achète [les bananes], mais ce jour-là, ils avaient d'autres intentions, a déclaré le procureur. Jean Laprade a commencé par poser des questions à la mineure avant finalement de tomber sur elle pour la violer», a dit en substance Mohamed Samoura, a rapporté le site d'informations Guinée Matin, qui a suivi le procès.

Représentant spécial

Des documents du gouvernement fédéral américain décrivent Jean Laprade comme un directeur d'Ultragold Holdings LLC, société établie à Denver, au Colorado, qui a été impliquée dans un projet de mine d'or en Guinée. Il n'est pas clair si Jean Laprade est toujours associé à la firme Ultragold.

Jocelyn Sweet, porte-parole d'Affaires mondiales Canada, explique que Jean Laprade a occupé le poste de consul honoraire du Canada en Guinée pendant près d'une décennie.

«Son mandat a débuté le 4 mai 2006 et s'est terminé le 20 juin 2015, date de fin prévue de sa nomination», dit Mme Sweet.

La caporale Annie Delisle, porte-parole de la Gendarmerie royale du Canada, note qu'en vertu du Code criminel canadien, les personnes coupables d'infractions à l'étranger sont tenues de contacter la police canadienne lorsqu'elles rentrent au pays.

«Lorsqu'un Canadien a été reconnu coupable d'un crime sexuel dans un autre pays, il (ou elle) se doit de le rapporter à la police lorsqu'il (ou elle) revient au Canada. Ceci doit être fait dans les sept jours suivant son arrivée au Canada», dit-elle.