L'acquittement d'un chauffeur de taxi accusé d'avoir agressé sexuellement une jeune passagère ivre, à Halifax, soulève depuis mercredi un tollé, certains réclamant même la révocation du juge.

Deux manifestations sont prévues la semaine prochaine à Halifax pour demander une révision de la décision du juge de la Cour provinciale Gregory Lenehan - et sa révocation pure et simple.

Le juge Lenehan a conclu mercredi que la Couronne n'avait pu démontrer hors de tout doute raisonnable que la présumée victime n'avait pas consenti à avoir une relation sexuelle avec le chauffeur de taxi Bassam Al-Rawi. Au cours d'un jugement de 20 minutes, le magistrat a notamment estimé qu'«une personne ivre peut être en mesure d'accorder son consentement».

Le chauffeur de 40 ans avait été accusé d'agression sexuelle en mai 2015 lorsque la police a trouvé la femme, dans la vingtaine, ivre-morte sur la banquette arrière du taxi, les jambes remontées sur les sièges avant, nue de la taille aux pieds.

La décision du juge Lenehan a immédiatement déclenché un tollé en Nouvelle-Écosse et dans les Maritimes sur la notion juridique d'ivresse et de consentement. D'autant plus qu'un jury à Terre-Neuve-et-Labrador venait d'acquitter, cinq jours plus tôt, un policier accusé d'avoir agressé sexuellement une femme en état d'ébriété.

«Le jugement de Lenehan dans cette affaire démontre un mépris flagrant et un manque flagrant de compréhension de ce que représente une agression sexuelle et de la définition de consentement telle que définie par le Code criminel», a écrit par voie de communiqué l'organisation Antigonish Women's Resource Centre of Sexual Assault Services, qui a rédigé la déclaration au nom de plusieurs groupes de femmes.

«Le juge Lenehan a démontré qu'il est incapable d'appliquer la loi équitablement dans des affaires d'agressions sexuelles et, par conséquent, il devrait être révoqué.»

Un porte-parole du service des poursuites pénales a indiqué vendredi qu'un appel dans cette affaire était à l'étude.

La ministre de la Justice de la Nouvelle-Écosse, Diana Whalen, a indiqué que le gouvernement «considérait ses options» pour réagir à cette nouvelle, ajoutant que cela soulignait la nécessité de fournir «plus d'éducation et plus de sensibilisation sur la question».

Interrogé sur cet enjeu à Vancouver, vendredi, le premier ministre Justin Trudeau n'a pas voulu commenter de cas spécifiques. Il a toutefois rappelé que selon lui, les victimes d'agressions sexuelles devaient bénéficier d'un procès équitable, qui aura de «réelles conséquences» sur les agresseurs reconnus coupables.

«Nous savons que nous avons beaucoup de travail à faire dans notre système judiciaire, dans nos lieux de travail et dans notre société et que c'est quelque chose que je me suis engagé à faire depuis très longtemps», a-t-il affirmé.

Elise MacIntyre, une mécanicienne automobile de 27 ans, prévoit rassembler un groupe qui composera des lettres de plainte demandant une sanction contre le juge, ou bien sa révocation pure et simple.

«Nous voulons une enquête sur son aptitude quant au poste qu'il occupe. Je crois qu'il manque d'empathie et de compréhension pour les questions sur lesquelles il se penche», a-t-elle expliqué en entrevue.