John Boulachanis vient d'être déclaré coupable du meurtre prémédité de Robert Tanguay, survenu il y a près de vingt ans.

Le jury de six hommes et six femmes a rendu sa décision vers 17h15 samedi au quatrième jour de ses délibérations au Centre des services judiciaires Gouin.

M. Boulachanis écope de la prison à vie. La victime a été abattue et enterrée dans une sablière de Rigaud le 9 août 1997.

John Boulachanis a fui pendant 13 ans, vivant sous plusieurs identités, dans trois pays, avant d'être épinglé en Floride, en juin 2011.

Un meurtre et son procès

Le 9 août 1997, Robert Tanguay, fils de fermier et soudeur qui évolue aussi dans un réseau de vol d'autos avec au moins trois autres complices, est conduit dans une sablière de Rigaud sous un faux motif. C'est la mort qui l'attend. L'homme de 32 ans est abattu et enterré dans la fosse que ses complices ont creusée préalablement pour l'y ensevelir. Ses ossements sont découverts quatre ans plus tard par une famille qui s'y promène.

Cette découverte amène la police à arrêter, quelques mois plus tard, un voleur d'autos qui frayait avec Tanguay : Max (nom fictif). L'année suivante, Max plaide coupable à une accusation réduite d'homicide involontaire et écope de 12 ans de prison.

En novembre 2011, un autre complice voleur d'autos, Sam (nom fictif), est arrêté à son tour relativement au meurtre de 1997. En 2014, il plaide coupable à une accusation de meurtre au deuxième degré et écope de la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans.

Le procès en bref

Max et Sam, que le tribunal nous interdit de nommer, sont venus témoigner au procès de Boulachanis, qui faisait partie de leur réseau de vol d'autos à l'époque. Ils ont raconté qu'ils avaient creusé la tombe avec Boulachanis avant le meurtre et qu'ils étaient présents quand ce dernier a abattu Tanguay avec une mitraillette et peut-être une autre arme, dans le « pit à sable », en début de soirée le 9 août 1997. Les trois ont enterré le cadavre avec de la chaux pour dissimuler les odeurs, selon la preuve présentée.

Deux mobiles ont été évoqués lors du procès : le fait que Tanguay menaçait de dénoncer leurs combines de vol d'autos à la police, et le fait que Boulachanis était l'amant de la femme de Tanguay, soit Dominique Drouin.

Boulachanis a été décrit comme le maître d'oeuvre du meurtre.

La Couronne, représentée par Mes Pierre-Olivier Gagnon et Joey Dubois, a fait entendre 25 témoins, dont au moins 7 étaient des détenus et ex-détenus. Certains sont venus parler des événements de 1997, et les autres, des comportements de Boulachanis après son arrestation en 2011.

Les avocats de la défense, Mes Marc Labelle et Kim Hogan, n'ont présenté aucun témoin. La défense a plaidé que la preuve de la Couronne s'appuyait sur des témoignages non fiables.

Mesures de sécurité extrêmes

Normalement, John Boulachanis aurait dû avoir son procès au palais de justice de Valleyfield. C'est dans cette région que le crime a été commis. Mais avec tout ce qui est arrivé après l'arrestation de Boulachanis, les autorités n'ont pas pris de risque. Depuis septembre, l'homme de 42 ans est jugé au Centre des services judiciaires Gouin, un endroit ultrasécurisé.

Dans l'immense box vitré conçu sur mesure pour les procès de motards et autres criminels jugés en groupe, Boulachanis est seul, tassé dans un coin. Même si tout est verrouillé, filmé et relié par un tunnel à la prison de Bordeaux, au moins trois agents des services correctionnels le surveillent en permanence. Et ce n'est pas la seule mesure de sécurité extrême qui est en vigueur.

Boulachanis a pris les grands moyens pour s'évader depuis son arrestation. Des tentatives spectaculaires à la Houdini, dont l'une a réussi, même si sa liberté n'a duré que quelques secondes. De l'intérieur des murs, Boulachanis aurait souvent tenté de faire intimider des témoins et d'en soudoyer d'autres, pour faire capoter son procès et être acquitté, selon la preuve entendue.

Le jury ignore pourquoi Boulachanis est jugé à Gouin. Au début du procès, le juge Michael Stober a demandé aux jurés de ne « tirer aucune conclusion » à ce sujet.