La Commission scolaire de Laval devra payer plus de 15 000 $ à un écolier brûlé jusqu'au cerveau par la solution chimique versée sur sa tête par un camarade de classe parce que son professeur de chimie a « banalisé » la dangerosité du produit, un ingrédient du Drano.

Le 26 février 2015, le mauvais plaisantin de l'école secondaire Saint-Maxime voulait faire une blague à son « grand ami » en lui lançant de l'hydroxyde de sodium dans les cheveux, explique la Cour du Québec dans un récent jugement.

L'élève l'avait volé dans son cours de chimie et croyait qu'il aurait l'effet d'une poudre à gratter.

Mais « il s'avère que l'hydroxyde de sodium est un produit très corrosif et toxique lorsqu'on y ajoute de l'eau », écrit le juge Richard Landry. Et ce qui devait arriver arriva : pris d'une sensation de brûlure, la victime « met de la neige et de la glace à l'endroit d'où provient la douleur », amplifiant la blessure. « Le produit chimique atteint [son] cerveau », décrit la décision.

Après des semaines de traitements quotidiens et de douleurs, le jeune homme de 15 ans s'en est finalement sorti avec une plaque de peau sans cheveux sur son cuir chevelu, ainsi qu'un traumatisme psychologique.

RESPONSABILITÉ DE L'ÉCOLE

Au coeur du débat : la description qu'a faite le professeur de chimie Éric Berthiaume du produit chimique avant la mauvaise blague.

« La preuve prépondérante démontre que les consignes de sécurité concernant l'usage de l'hydroxyde de sodium sont loin d'avoir été aussi claires et précises que l'ont laissé entendre l'enseignant et la responsable des travaux pratiques », qui disaient en avoir expliqué les dangers aux écoliers, a écrit le juge Landry. Le jeune plaisantin, lui, jurait que M. Berthiaume avait plutôt qualifié de « feeling weird » l'effet du produit sur ses doigts.

Si les élèves avaient été informés clairement « du caractère hautement corrosif et toxique » du produit, « jamais [l'adolescent] n'en aurait déversé sur la tête de son meilleur ami pour faire une blague ».

« Bien que son geste soit répréhensible, c'est la banalisation du produit qui est la cause déterminante de ce drame. » - Extrait de la décision

Résultat : « l'école a manqué à ses devoirs » et doit être tenue responsable des conséquences de la blessure.

Ces conséquences, écrit le juge Landry, vaudraient normalement une compensation de 20 000 $ : la victime a souffert et doit vivre avec « une plaie très apparente ». « D'un caractère plutôt enjoué, il déteste dorénavant les blagues et cela a engendré un mauvais caractère qu'on ne lui connaissait pas, détaille la décision. Il est plus nerveux et sa confiance en soi a été affectée. »

Mais comme sa famille a poursuivi aux petites créances, le juge Landry a dû diminuer la somme accordée à 15 000 $, le maximum prévu.

Dans une brève entrevue téléphonique, sa mère s'est dite satisfaite du jugement. « Je suis allée devant la justice pour faire respecter les droits de mon fils et pour rien d'autre », a-t-elle affirmé, ajoutant que son fils continuait à vivre avec les conséquences de l'événement.

La Commission scolaire de Laval n'a pas voulu commenter le jugement.

Le mauvais plaisantin, lui, a été suspendu pour une semaine juste après les faits. « Cet événement a mis un terme à sa grande amitié » avec la victime, selon son témoignage.