La fillette de 11 ans étranglée et laissée pour morte dans une ruelle de Saint-Laurent en 2013 est devenue une adolescente forte et brillante, du moins à voir l'aplomb avec lequel elle a témoigné au procès de celui qui l'aurait agressée.

La jeune fille qui aura bientôt 13 ans ne s'est pas laissé démonter par le barrage de questions de la défense, hier, au second jour de son témoignage au palais de justice de Montréal.

La victime a répondu avec assurance aux questions de la criminaliste Me Sharon Sandiford durant toute la journée, sans que cette dernière réussisse à relever de contradictions majeures dans son témoignage.

Les médias ne peuvent pas identifier l'accusé afin de protéger l'identité de la victime.

Un ami de la famille

Originaire du Sri Lanka, l'homme de 43 ans était un ami de la famille. L'enfant le décrivait même comme son «oncle». Il vivait dans un logement adjacent à celui de sa famille dans l'arrondissement de Saint-Laurent.

L'accusé a plaidé non coupable à des accusations de tentative de meurtre et d'agression sexuelle.

Durant la soirée du 26 mai 2013, l'enfant était seule chez elle lorsque l'homme lui a rendu visite. Il lui a fait essayer des colliers pour ensuite tenter de l'étrangler avec une corde à danser, selon la version de la victime.

L'enfant a perdu connaissance et s'est réveillée couchée dans une ruelle non loin de son logement, le soutien-gorge déchiré, le nez et les mains en sang. Elle avait encore la corde à danser autour du cou.

La petite a tenté de trouver refuge chez un premier voisin qui a refusé de l'aider. Elle s'est ensuite rendue tant bien que mal chez une amie. Les parents de cette amie ont alors contacté la mère de la victime, qui est rapidement venue les rejoindre.

À son arrivée à l'appartement où s'était réfugiée sa fille, la mère a éclaté en sanglots apercevant sa petite en si piteux état. Elle composera ensuite le 911.

La défense a fait jouer cet enregistrement, hier, au procès.

«J'ai besoin de la police. Quelqu'un a tenté de tuer ma fille», dira cette mère dans un anglais approximatif. La répartitrice ne comprend pas grand-chose, si bien que la mère lui passe sa fille qui vient de se faire agresser.

«Quelqu'un a essayé de me tuer. Une personne qui habite à côté. Il a déchiré tous mes vêtements. Il a pris une corde. Il l'a mise autour de mon cou. Il a serré très fort», explique à la répartitrice la fillette en faisant preuve d'un calme exemplaire.

«Pourquoi a-t-il essayé de vous tuer?», demande la répartitrice. «Je ne sais pas», lui répond la victime d'une voix faible.

La fillette poursuit en identifiant l'accusé comme l'homme qui a tenté de l'assassiner. Elle n'arrive pas à décrire comment il était habillé. «Je ne me souviens de rien», ajoute-t-elle. On entend la mère de la victime pleurer derrière.

Vêtements déchirés

En contre-interrogatoire, hier, la défense a soulevé le fait que la victime - au moment de son appel au 911 - désignait l'accusé comme l'homme qui avait déchiré ses vêtements, alors qu'au procès, elle a plutôt déclaré qu'elle ne pouvait pas dire qui les avait déchirés.

La jeune fille n'a pas paru ébranlée par la question. «C'est lui qui a essayé de me tuer, a martelé la victime. Avant qu'il m'étrangle, mes vêtements n'étaient pas déchirés. C'est pour cela que j'ai dit [au 911] que c'était lui.» «Mais tu ne l'as pas vu en train de les déchirer?», a repris la criminaliste, insistante, mais toujours polie. «Non», a répondu l'adolescente toujours avec le même aplomb.

Le soir du drame, l'accusé est venu cogner à deux reprises à la porte du logement où la fillette venait de se réfugier. La première fois, la mère de l'amie de la victime a menti en disant qu'elle n'avait pas vu l'enfant afin de la protéger. La seconde fois, elle n'a pas répondu.

Des mesures particulières ont été prises pour encadrer le témoignage de la jeune fille. L'adolescente ne se trouve jamais dans la même pièce que l'accusé. Elle est accompagnée en tout temps d'une intervenante sociale. Son témoignage est retransmis par vidéoconférence dans la salle d'audience où siège la juge.

Le procès, qui se déroule devant la juge Silvie Kovacevich, se poursuit le 30 mars avec la suite du contre-interrogatoire de la victime.