Qualifiant les gestes du pompier Patrick Deschatelets d'«abominables, cruels et inhumains», le juge Claude Provost l'a déclaré coupable d'homicide involontaire et de négligence criminelle ayant causé la mort, jeudi, au palais de justice de Longueuil.

«La preuve démontre hors de tout doute raisonnable que ces gestes ont démontré une insouciance déréglée et téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité de la victime», a dit le magistrat. Pendant la lecture du jugement, l'accusé, qui est en liberté, est resté accoudé à côté de son avocat, faisant dos à la salle d'audience.

Le drame est survenu le 23 février 2008 lors d'une activité de sadomasochisme, au sous-sol du domicile de Patrick Deschatelets, à Saint-Bruno-de-Montarville.

Environ 24 heures après le début de la séance, l'accusé a attaché un lourd collier de métal au cou de la victime, qu'il fréquentait depuis quatre mois. Le collier était attaché à une chaîne fixée au plafond, de sorte que la femme de 39 ans était contrainte de rester debout. Ses poignets étaient menottés.

Patrick Deschatelets a retrouvé sa partenaire inconsciente après s'être absenté une vingtaine de minutes pour aller acheter des pâtes à l'épicerie. Elle est morte pendue par le poids du collier, qui, aux yeux de juge, s'apparentait «davantage à un instrument de torture du Moyen-Âge qu'à un objet de décoration, de parure ou d'ornement».

Claude Provost a souligné qu'il n'existe pas au Canada de décision ayant tracé les paramètres légaux d'activités sadomasochistes. Les adeptes peuvent suivre certaines recommandations, dont celles de ne pas abandonner une personne placée dans une situation de vulnérabilité. Il est aussi conseillé d'utiliser un code pour indiquer au partenaire de cesser une activité trop douloureuse.

Patrick Deschatelets, pompier à Montréal, n'avait pas pris ces précautions.

L'homme de 46 ans a fait subir à la victime «de multiples vexations de tous ordres»: il lui a, entre autres choses, administré des décharges de taser et demandé de boire son urine. «Son intégrité, son équilibre psychologique, sa liberté, sa dignité ont été durement mis à l'épreuve», a dit le juge Claude Provost.

Patrick Deschatelets a répété à plusieurs reprises que la victime, qui jouait le rôle de la «soumise», était consentante. Or, «cet argument est sans valeur d'un point de vue juridique», a fait valoir le juge Provost. À titre de comparaison, il a souligné qu'un conducteur qui consent à ce qu'une personne pratique le surf en voiture pourrait faire face aux mêmes accusations.

En sortant de la salle d'audience, la soeur cadette de la victime a souri, soulagée par la conclusion de ces cinq années difficiles. «Ç'a été une catastrophe pour toute la famille», a-t-elle dit, soulignant la détresse qu'a pu ressentir le fils de la victime, qui n'avait que 9 ans lors du drame.

Les plaidoiries sur la peine auront lieu le 17 avril. Le tribunal a ordonné l'arrêt du procès sur le chef d'homicide involontaire, invoquant la règle selon laquelle une personne ne peut être punie plus d'une fois pour la même infraction.