Les automobilistes et camionneurs circulant sur Côte-Nord ont été témoins d'une scène morbide, hier matin.

Des dépouilles d'orignaux avaient été accrochées pendant la nuit sur un panneau annonçant le territoire ancestral (Nitassinan) de la communauté innue de Pessamit.

Au moins six orignaux, dont des veaux et deux femelles enceintes, avaient été trouvés démembrés lundi matin le long de la route 385, au nord de Forestville. Ce sont de toute évidence ces mêmes restes qui ont été accrochés dans la nuit de mardi à hier à la jonction des routes 138 et 385.

On ne savait toujours pas, hier, qui s'était rendu coupable du carnage - de toute évidence des braconniers. On n'en savait pas davantage sur l'identité des personnes qui avaient déplacé et accroché les carcasses.

Cette découverte a causé un choc à Forestville, mais surtout à Pessamit, communauté innue établie à une cinquantaine de kilomètres à l'est.

André Côté, directeur du secteur territoire et ressources naturelles du Conseil des Innus, a qualifié ce geste d'« inacceptable » et a ajouté que le Conseil le condamnait, « peu importe qui en est coupable ». Il a également assuré que le Conseil collaborait avec la Direction de la protection de la faune, qui mène l'enquête sur les gestes commis et dont des agents ont décroché les dépouilles hier.

« On ne sait pas du tout qui a fait ça ni dans quel état ces personnes étaient, a dit M. Côté à La Presse. Les gens sont déçus, mais d'une certaine façon, ils ne sont pas surpris que ce genre de geste déplorable soit posé... »

Même si cet acte « visait la communauté de Pessamit », M. Côté évite d'évoquer un crime haineux. « On ne veut pas se lancer dans les grands mots », a-t-il dit.

La Protection de la faune, qui condamne elle aussi publiquement ce méfait, compte porter plainte à la Sûreté du Québec au cours des prochains jours.

APPEL AU CALME

Décrivant l'événement comme « inquiétant et inacceptable », Micheline Anctil, mairesse de Forestville, a lancé un appel au calme hier, après que plusieurs personnes eurent accusé sans preuve les Innus des actes de braconnage du week-end.

Elle assure que Blancs et Innus cohabitent de manière harmonieuse dans cette région prisée des chasseurs et des pêcheurs de la province. « Il y a des règles en place et il y aura des sanctions pour les coupables », a-t-elle dit.

André Côté rappelle par ailleurs le grand respect que vouent les Innus aux ressources animales, utilisant presque toutes les parties des bêtes après la chasse. Le museau, notamment, est décrit comme « une pièce de choix ».

« C'est pourquoi vous ne verrez jamais un Innu avec une tête d'orignal sur le capot de son véhicule. C'est un manque de respect », explique-t-il.

Cette histoire rappelle tristement une affaire similaire survenue en 2001 non loin de là. Des personnes qui avaient trouvé des restes d'orignaux dans un ravage les avaient étalés sur le parvis de l'église des Escoumins et avaient accusé sans preuve les Montagnais de la communauté d'Essipit de les avoir abattus.

La Direction de la protection de la faune invite toutes les personnes qui constatent des actes de braconnage à les dénoncer de manière anonyme au 1 800 463-2191.

Photo tirée du site du Conseil des innus de Pessamit

La communauté innue de Pessamit