Condamné en 2009 pour des actes commis au nom du « djihad islamique », Omar Bulphred est aujourd'hui accusé d'avoir conseillé à un proche d'assassiner trois personnes, dont son propre père. Récit.

Le Montréalais Omar Bulphred avait reçu une lourde peine de détention en 2009 pour avoir planifié un attentat contre un centre communautaire juif et avoir incendié une école juive d'Outremont au nom du « djihad islamique ». En 2015, l'ancien « soldat d'Allah » confiait à La Presse aspirer à une nouvelle vie. Il est maintenant accusé d'avoir conseillé à quelqu'un d'assassiner trois personnes, soit son père et deux personnes choisies au hasard.

L'homme de 32 ans a été accusé, vendredi, d'avoir conseillé de commettre le meurtre de son père - aussi nommé Omar Bulphred -, d'une « prostituée non identifiée » et d'une « locataire non identifiée », le 2 décembre dernier dans l'est de Montréal. Selon nos informations, Omar Bulphred aurait évoqué plusieurs fois à un proche la possibilité de tuer des gens. Il était devenu récemment de plus en plus incontrôlable. Ainsi, il aurait suggéré à un proche d'attendre dans un couloir d'un immeuble d'appartements et de tuer un locataire au hasard. C'est la goutte qui aurait fait déborder le vase pour la personne qui l'a dénoncé aux policiers.

C'est à la prison de Bordeaux, à l'âge de 19 ans, qu'Omar Bulphred se radicalise, sous l'influence de détenus musulmans. Même si son père d'origine algérienne est musulman, le jeune homme né en Géorgie n'est pas pratiquant. Or, il commence à lire le Coran et à pratiquer la religion de façon « archaïque ». À sa sortie de prison, en septembre 2006, le jeune homme lance un engin incendiaire contre l'école juive d'Outremont, Toldos Yakov Yosef. L'attaque ne fait pas de blessés. Avec l'aide d'un complice, Azim Ibragimov, il incendie un véhicule dans l'est de Montréal quelques jours plus tard. À cette période-là, il était prêt à « mourir à 20 ans pour l'islam », avait-il confié à La Presse en 2013.

HAINE DES JUIFS

Sa nouvelle haine des juifs ne s'arrête pas là. En avril 2007, il planifie de faire exploser le centre communautaire Ben Weider, dans le quartier Côte-des-Neiges, avec des bonbonnes de propane. Son projet d'attentat fomenté au nom du « djihad islamique » échoue heureusement. Au cours de cette période, il envisage d'enlever et d'assassiner un participant du Bal en Blanc. « Je vais prendre un couteau, tu vas conduire, on va trouver quelqu'un, prendre ses cartes et aller au guichet automatique. Puis on va l'égorger et brûler le char. On va l'attacher comme un poulet et l'égorger comme un poulet », avait dit Bulphred à son complice Azim Ibragimov, avait rapporté La Presse. Cette conversation est toutefois interceptée par les policiers qui avaient mis le duo sous surveillance.

Omar Bulphred est condamné en 2009 à une peine de sept ans de pénitencier. « Je rêvais d'un aller simple pour le paradis, je devais me sacrifier pour la cause », dit-il à La Presse en 2013.

Pendant ses années en pénitencier, Omar Bulphred croise d'autres extrémistes et continue d'entretenir ses idées djihadistes.

Des écrits portant sur des « fantasmes meurtriers de démembrement » et des conversations décrivant « l'extase du meurtre » et la « renaissance du terrorisme » sont découverts dans sa cellule, selon un rapport de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Il avait aussi tenté de frapper un agent correctionnel avec un bâton de bois pointu pendant sa détention, indiquait le rapport.

Omar Bulphred récidive un mois après sa sortie de prison, à l'été 2012, et écope de six mois de prison pour avoir proféré des menaces de mort et avoir rôdé sur une propriété privée. On apprend alors qu'il souffre du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme. Rencontré par La Presse en avril 2015, le jeune homme semble transformé et repenti. « Je suis content d'avoir évolué et de me diriger vers quelque chose de positif », dit-il. Il jette un regard critique sur son passé et appelle les parents à rester vigilants pour reconnaître les signes de radicalisation chez leurs enfants. Il confie à La Presse vouloir se faire « oublier ». « J'espère que c'est la dernière fois qu'on parle de moi », dit-il. Mais son souhait ne sera pas exaucé. Détenu, il doit revenir en cour le 21 décembre.

- Avec la collaboration de Daniel Renaud, La Presse