Justin Bourque a été arrêté indemne, tard hier soir, au terme d'une longue et angoissante chasse à l'homme dans les rues de Moncton.

Quelques heures plus tôt, l'identité d'une première victime avait été dévoilée. Il s'agit d'un Québécois de Victoriaville.

Vers minuit heure de l'Est, au terme de 36 heures de fuite, c'est le groupe tactique de la GRC qui a mis la main au collet de l'homme de 24 ans soupçonné d'avoir abattu trois policiers et d'en avoir blessé deux autres.

Michelle Thibodeau était chez ses parents, rue Mecca, lorsque des agents lourdement armés ont fait irruption dans sa cour en criant en direction du boisé qui jouxte le terrain. « Ils ordonnaient à quelqu'un de se rendre », raconte la jeune femme, qui est allée se réfugier dans la cave avec sa famille durant l'opération.

Par une fenêtre, elle a vu Justin Bourque sortir dans la lumière les mains en l'air en criant : « I'm done. ». « J'ai fini. »

Les agents auraient ensuite entraîné le suspect jusque devant la maison avant de le coucher par terre et de le fouiller, puis de le faire monter dans un véhicule.

« Le pire, c'est qu'on n'a aucune idée depuis quand il était là. On a sorti le chien dans la cour deux ou trois fois dans la soirée. », a mentionné Mme Thibodeau.

Photo Andrew Vaughan, La Presse Canadienne

Un officier de la GRC.

Un Québécois tué

Hier, La Presse a pu confirmer que Dave Ross, un membre de l'escouade canine de la GRC originaire de Victoriaville dans le Centre-du-Québec faisait partie des trois victimes de Justin Bourque.

Les proches de Dave Ross ont appris la tragique nouvelle tôt hier matin. « Ses parents sont partis là-

bas pour le voir », a confié son cousin Guillaume Ross lors d'un entretien téléphonique.

Dave a grandi à Victoriaville. C'est pour réaliser son rêve de s'engager au sein de la police nationale qu'il s'est expatrié il y a quelques années. « C'était un gars protecteur. C'est pour ça qu'il est devenu policier, a raconté son cousin. Comme il n'y avait pas de postes ici, il est parti à Moncton. »

Là-bas, il a rencontré Rachael Vander Ploeg, une infirmière qu'il a fini par épouser. Sur le profil Facebook de la jeune femme, on voit le couple lors de son mariage. Le marié porte fièrement son uniforme rouge de la GRC, la mariée sourit, ils posent joue contre joue. Dave et Rachael ont un fils, Austin, un petit garçon blond comme sa maman. Elle attend un deuxième enfant, que Dave ne connaîtra jamais.

Guillaume Ross décrit la victime comme « un gars de bois qui a toujours aimé la chasse et le trappage et qui adorait les animaux ». Sur Facebook, sa cousine Lucinda Ross, qui habite elle aussi à Victoriaville, en parle comme « d'un maître-chien passionné par son travail ».

L'homme offrait d'ailleurs des démonstrations de son travail avec les chiens à la population dans le cadre de présentations offertes par le corps de police.

La police a refusé de dévoiler l'identité des trois policiers abattus, mais a confirmé qu'une des victimes était père de trois enfants.

Hier, un des policiers blessés, dont le nom n'a pas été divulgué lui non plus, a reçu son congé de l'hôpital.

Une longue traque

Justin Bourque est demeuré introuvable jusque dans la nuit. Les policiers se préparaient d'ailleurs à une deuxième nuit de traque et ils ont demandé aux citoyens de garder leurs lumières extérieures allumées afin de faciliter les recherches.

Hier après-midi, on a cru un instant à la fin de la fuite du suspect après que les policiers eurent entrepris une opération, encerclant une maison avec des camions blindés et un groupe tactique d'intervention équipée d'un robot. Selon certains médias, ils ont pénétré à l'intérieur de la maison, mais sont repartis. Peu d'informations ont filtré sur cette opération qui a duré 3 heures. La GRC se refusait à tout commentaire afin de ne pas informer le tireur de ses faits et gestes.

Les médias ont d'ailleurs été avertis de rester le plus discrets possible sur les mouvements des forces de l'ordre. La GRC n'a pas voulu dire si certains indices lui laissaient croire que le tireur consultait les réseaux sociaux.

« Restez à l'intérieur, verrouillez vos portes, soyez prudents ! », avait insisté la caporale Chantal Farrah lors d'un point de presse en après-midi.

Quelques heures auparavant, la surintendante de la GRC-Codiac, Marlene Snowman, avait confirmé que le suspect avait été aperçu trois fois en matinée, mais les policiers ne sont pas parvenus à le capturer. Il avait été vu pour la dernière fois vers 8 h, au nord de la ville où un périmètre de sécurité a été érigé.

Les policiers peinaient à contenir leurs émotions lors des points de presse. Le commandant de la GRC au Nouveau-Brunswick Roger Brown, qui participait au point de presse de l'après-midi, a déclaré la voix tremblante qu'il s'agissait du jour le plus « sombre » de l'histoire de la GRC dans la province.

Dans la nuit de mercredi à jeudi, c'est le porte-

parole de la GRC Damien Thériault qui s'était présenté devant les caméras pour confirmer la mort de trois de leurs collègues. Manifestement sous le choc, le policier peinait à retenir ses larmes, mais il a tenu à assurer à la population de Moncton que les forces de l'ordre travailleraient sans relâche pour retrouver la trace du tueur.

Différents corps policiers de partout au pays étaient venus prêter main-forte à la GRC.