Le conjoint de la jeune femme de 24 ans trouvée morte dans une forêt de Val-David la fin de semaine dernière aurait affirmé, le jour même de la disparition, que «jamais il n'irait à l'hôpital» avec elle, malgré ses possibles symptômes psychotiques.

C'est du moins ce qu'a relaté à La Presse, vendredi après-midi, la thérapeute en «theta-healing» qui se trouvait au domicile du couple lorsque Silvana Uribe Giraldo est partie marcher dans le bois près de la maison. Elle n'en est jamais ressortie vivante. Les causes de sa mort sont toujours floues, mais aucune marque de violence n'aurait été retrouvée sur son corps.

La thérapeute Mélanie, dont nous taisons le nom de famille, a indiqué avoir tenté d'appliquer ses méthodes alternatives sur Mme Uribe Giraldo. La séance «était imposée par son conjoint», a-t-elle dit en entrevue. Celui-ci trouvait que son amie de coeur n'allait pas bien depuis déjà un bon moment.

Après 20 minutes de tentatives de «theta-healing» restées vaines, Mélanie aurait dit au conjoint de la jeune femme qu'elle semblait souffrir d'un grave trouble de santé mentale.

«Il m'a clairement expliqué comment elle était depuis quelques semaines. Ça faisait des semaines qu'elle déplaçait les objets dans la maison et qu'elle faisait des trucs bizarres, a-t-elle dit en entrevue. Je lui ai dit que ça ressemblait à une psychose. [...] Je lui ai dit que c'était très grave, une psychose.» Mélanie dit même avoir évoqué un risque de suicide avec l'homme.

Naturopathie et médication naturelle

Malgré ce signal d'alarme, le conjoint de la jeune femme «semblait vraiment vouloir la traiter plus avec la naturopathie, plus avec la médication naturelle», a relaté la thérapeute.

Il lui a dit «que lui, jamais il n'irait à l'hôpital» avec sa jeune conjointe, a-t-elle rapporté.

En soirée, la thérapeute a toutefois rappelé La Presse après avoir lu une première version de ce texte. Elle a alors rétracté presque toutes ses affirmations précédentes. Selon cette nouvelle version des faits, le conjoint de Mme Uribe Giraldo se serait contenté d'affirmer que personnellement il préférait les médecines alternatives et n'aurait jamais indiqué qu'il n'irait pas à l'hôpital avec elle. Selon la thérapeute, l'homme aurait même évoqué l'idée de placer sa conjointe en institution.

La Presse a tenté à plusieurs reprises de joindre le conjoint de Mme Uribe Giraldo, dont nous taisons le nom. Au moment de mettre sous presse, il n'avait pas rappelé.

Sur sa page Facebook, on peut lire: «Je fais partie d'une secte dont je suis le seul adepte et le guru en même temps.»

Mme Uribe Giraldo n'était pas étrangère au monde «alternatif». Sa page Facebook foisonne d'images New Age et de photographies de séances où plusieurs individus bariolent leur corps dénudé de symboles mystérieux. Elle semble aussi avoir été passionnée par la cueillette de champignons divers.

Le «theta-healing»

La thérapeute qui se trouvait au domicile de Silvana Uribe Giraldo lorsque celle-ci est partie marcher en forêt s'annonce sur l'internet en tant que spécialiste du «theta-healing».

Mélanie y assure qu'il s'agit d'«une technique qui permet de reprogrammer notre vie telle qu'on le désire». Dans sa petite annonce, elle se décrit d'ailleurs comme «médium» et évoque la «reprogrammation d'ADN».

Selon Marie-Ève Garand, du Centre d'information sur les nouvelles religions de l'Université de Montréal, il s'agit d'un système de croyances qui s'inscrit dans la lignée d'une méthode plus connue appelée le Reiki. «Ils proposent d'activer l'ADN pour pouvoir changer le niveau énergétique des personnes», a exposé la professeure Garand, spécialiste de ces mouvances.

Un rejet dangereux

La tendance de certains individus à rejeter la médecine et la psychologie traditionnelles peut s'avérer très dangereuse pour eux-mêmes et leurs proches, selon la présidente de l'Ordre des psychologues, Rose-Marie Charest.

«À partir du moment où une personne souffre d'un trouble psychologique ou d'un trouble mental, cette personne-là a besoin d'un traitement. Ce traitement doit être offert par une personne compétente, a-t-elle affirmé en entrevue téléphonique avec La Presse. Dans le doute, il faut demander une évaluation par un professionnel compétent.»

Mme Charest se dit abasourdie par l'ampleur de l'industrie des thérapies dites alternatives.

«Le public est trop souvent attiré par le miracle qui est promis», a-t-elle déploré.