La fin en queue de poisson de l'opération SharQc pourrait coûter cher aux Québécois. Une vingtaine de Hells Angels arrêtés dans ce fameux coup de filet en 2009 réclame 50 millions de dollars à Québec en raison de la « violation délibérée » de leurs droits constitutionnels par les procureurs et la Sûreté du Québec.

Deux groupes de motards ont déposé mercredi dernier au palais de justice de Montréal des poursuites contre la Procureure générale du Québec et le ministère de la Justice du Québec. Ces poursuites jadis inédites ne le sont plus du tout. Ces motards suivent ainsi l'exemple de l'influent Hells Angel Salvatore Cazzetta et de deux autres Hells qui ont déposé des poursuites de millions de dollars cet été avec sensiblement les mêmes arguments contre l'État.

Le premier groupe de 15 Hells Angels demande à Québec plus de 30 millions de dollars, compte tenu de « l'atteinte flagrante aux droits, la gravité des fautes commises, l'abus de pouvoir, la période sur laquelle l'abus s'est échelonné, les circonstances et le préjudice subi par l'antécédent judiciaire de complot de meurtre ».

Quatre autres Hells Angels, Roberto Campagna, Marc Readman, Daniel Royer et Jean-Damien Perron, réclament pour leur part 17 millions, dont 5 millions en dommages punitifs dans une poursuite distincte déposée le même jour.

Accusés de meurtre au premier degré et de complot pour meurtre pendant l'opération SharQc, les 19 demandeurs ont plaidé coupable à une accusation de complot pour meurtre à la suite de négociation avec la Couronne. Or, ils accusent le Ministère public d'avoir fait preuve de « mauvaise foi évidente » en leur cachant de la preuve qu'elle savait « dommageables pour la crédibilité » du délateur-clé Sylvain Boulanger.

Des manquements à leurs droits ?

Ils reprennent également les mots du juge James Brunton qui avait reproché à la Couronne d'avoir privilégié « leur désir de gagner à tout prix au détriment des principes fondamentaux qui forment la fondation de notre système de justice pénale », lorsqu'il a ordonné l'arrêt des procédures du mégaprocès en octobre 2015.

« [Ils] ont été sciemment privés par la Poursuivante et la SQ d'obtenir et de connaître l'ensemble des éléments de preuve manifestement pertinents, importants, et intrinsèquement liés aux accusations portées contre eux et alors en possession de ces derniers, et plus particulièrement, des points faibles de la preuve à charge contre les demandeurs afin de faire un choix éclairé », allègue-t-on dans la poursuite du groupe des 15.

Les policiers de la Sûreté du Québec (SQ) ont également commis une « faute très grave, inexcusable et empreinte de témérité », avancent les Hells Angels.

Les motards allèguent avoir purgé une peine « injustifiée » et réclament ainsi des millions de dollars en dommages pour « emprisonnement illégal ». Le groupe des 15 a purgé des peines « injustifiées » variant entre 6 mois et 8 mois pour la plupart et de surcroît à la prison de Bordeaux, un établissement « insalubre » où règnent « tension, stress et violence », selon les demandeurs.

Dans le second recours, les quatre Hells Angels réclament des sommes plus élevées, comme ceux-ci ont été incarcérés de façon « injustifiée » pour des périodes plus longues, dont pendant près de trois ans pour Campagna et Readman.

Le premier groupe de demandeurs est composé de Jean-Paul Ramsay, Michel Guertin, Guy Dubé, Claude Lavigne, Bernard Plourde, Normand Labell, Bertrand Joyal, Michel Langlois, Dean Moore, Stéphane Plouffe, Éric Bouffard, Gaétan Proulx, Clermont Carrier, Sylvain Tétreault et Frédéric Landry-Hétu.