Les différents corps de police du Québec sont à l'affût, quelques jours avant Noël, avec la sortie imminente de prison d'un membre influent de la mafia montréalaise.

Condamnés en septembre dernier pour avoir comploté le meurtre de l'aspirant parrain Salvatore Montagna commis en novembre 2011, le protégé du caïd Raynald Desjardins, Vittorio Mirarchi, et deux membres de sa garde rapprochée quitteront bientôt la prison, leur peine purgée.

Mirarchi, 40 ans, a été condamné à neuf ans de pénitencier en septembre dernier, le juge ayant entériné une suggestion commune entre la Couronne et la défense qualifiée de « compromis » par le procureur de la poursuite. Mais en soustrayant la période de détention préventive, calculée en temps et demi, il ne lui restait alors que quatre mois et demi à purger.

UN FILM MIS SUR PAUSE

Mirarchi, Desjardins et une demi-douzaine d'autres individus ont été arrêtés le 20 décembre 2011, un mois après le meurtre de Montagna, en grande partie parce que la Gendarmerie royale du Canada (GRC), qui enquêtait sur la relève de la mafia montréalaise, avait trouvé le moyen d'intercepter les messages textes des membres de leur clan. La mafia était alors de nouveau secouée par une guerre interne, à trois clans cette fois-ci : Rizzuto, Desjardins et Montagna.

« Le 20 décembre 2011, c'est un peu comme si on avait mis le film sur pause. Il se peut qu'avec la libération de Mirarchi, quelqu'un appuie de nouveau sur le bouton en marche », a confié un policier à La Presse.

Selon certaines informations, des chefs de clan de la mafia auraient convoqué une ou des rencontres dans les prochains jours pour tenter de savoir à quoi s'attendre ou être fixés sur certaines intentions dans le contexte de cette libération.

« Nous sommes attentifs et proactifs pour suivre l'évolution de la situation qui est très imprévisible. On ne peut pas prévoir ce qui va se passer », a déclaré la semaine dernière le commandant de la Division du crime organisé (DCO) de la police de Montréal, Nicodemo Milano, lorsqu'interrogé par La Presse sur la libération de Mirarchi.

Ce dernier est considéré par la police comme un important importateur de cocaïne, même s'il n'a pas été accusé d'un tel crime - malgré une preuve qui aurait pu être accablante - à l'issue de l'enquête Clemenza menée par la GRC en 2011.

Mirarchi a de forts appuis en Ontario, en particulier dans la région d'Ottawa.

ACCALMIE RELATIVE

Affaiblie par des années de guerres intestines, la mafia montréalaise a actuellement une structure cellulaire et linéaire - et non pas pyramidale - et est composée de clans à prédominance calabraise et sicilienne qui font toutefois des affaires ensemble et partagent leur expertise.

Le commandant Milano, qui parle en son nom et non au nom des autres corps de police, affirme qu'il y a actuellement une accalmie à Montréal, qu'il n'y a aucun chef qui se démarque par rapport aux autres et aucun clan dominant, même si celui des Rizzuto-Sollecito (Siciliens) s'est un peu renforcé au cours des derniers mois.

Le dernier attentat lié à la mafia montréalaise est survenu à la mi-août lorsque Antonio De Blasio a été tué sous les yeux de son fils de 12 ans qui venait de terminer un entraînement de football dans un parc du quartier Saint-Léonard.

« Il y une accalmie relative sur le territoire de la ville de Montréal. Le crime organisé traditionnel italien (COTI) est toujours à la recherche de réseautage pour amasser des profits, et ce sont des associations par opportunité, et non pas par culture, par village ou par langue », dit Nicodemo Milano, commandant de la Division du crime organisé (DCO) de la police de Montréal.

« Depuis l'opération Magot-Mastiff en novembre 2015, nous n'avons pas identifié de "table" ou d'alliance rassemblant des clans de la mafia. Pour plusieurs raisons. Les acteurs importants sont incarcérés, ils ont très peur d'assumer une position et un rôle de chef ou ils opèrent dans le secret total et avec beaucoup d'intermédiaires. Le chef place plusieurs individus entre lui et les exécutants pour s'isoler d'éventuelles accusations criminelles et, le plus important dans le contexte actuel, éviter de se faire tuer », ajoute l'officier.

Selon le commandant Milano, plusieurs membres de la mafia se tiennent actuellement en retrait, attendant de pouvoir prouver leur loyauté à un chef qui sortirait du lot, et pour le moment, il n'y en aurait aucun.

Le commandant Milano affirme que les alliances au sein de la mafia sont actuellement très éphémères et qu'il n'y a aucune intention chez les mafiosi de l'Ontario, des États-Unis ou de l'Italie de venir s'établir à Montréal.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.

Photo Ivanoh Demers, archives La Presse

Nicodemo Milano, commandant de la Division du crime organisé (DCO) de la police de Montréal

Photo archives La Presse

Vittorio Mirarchi