Treize ans après les faits, une enquête conjointe de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et du fisc a permis de déposer des accusations criminelles contre un personnage central de la commission Charbonneau, l'homme d'affaires Louis-Pierre Lafortune, qui aurait fraudé l'impôt de plusieurs millions de dollars lorsqu'il est devenu vice-président de Grues Guay, la plus importante entreprise de grues au Canada.

Des accusations de fraude à l'endroit du gouvernement et d'infractions criminelles en vertu de la Loi sur l'impôt sur le revenu ont été déposées au palais de justice de Laval contre Lafortune et son ancien partenaire d'affaires, Yannick Payette.

Les enquêteurs de la police et de l'Agence du revenu du Canada ont mis des années à suivre la trace de la fortune des deux hommes.

Tous deux sont accusés d'avoir caché des revenus personnels de 3,3 millions et des revenus d'entreprises de 14 millions générés lors de la vente de cinq entreprises québécoises de location de grues sous leur contrôle. Les entreprises avaient été avalées en 2004 par le géant Grues Guay, qui n'est pas visé par l'enquête. Lafortune était ensuite devenu vice-président de Grues Guay jusqu'à son arrestation en 2009 dans le cadre de l'opération policière Diligence, qui visait à contrer l'infiltration du crime organisé dans l'industrie de la construction.

Louis-Pierre Lafortune a été reconnu coupable de complot en vue de recycler les produits de la criminalité à la suite de l'enquête Diligence. La juge Johanne St-Gelais l'a condamné récemment à une peine de 12 mois à purger dans la collectivité. Dans sa décision, elle note que M. Lafortune dit avoir eu la vie difficile depuis sa première arrestation. « À la suite des accusations, son rythme de vie a considérablement diminué. Les voyages, les activités mondaines, l'accès à un hélicoptère font partie du passé », note-t-elle.

Le principal intéressé fait appel du verdict de culpabilité dans ce dossier.

Bien branché

La preuve exposée à la commission Charbonneau avait montré à quel point Lafortune avait ses entrées dans différents milieux. Très branché dans le monde des affaires, il embauchait des lobbyistes pour faire avancer ses intérêts et avait participé à des activités de financement du Parti libéral du Québec ainsi que du Parti québécois. Il avait ses entrées auprès des syndicats de la FTQ-Construction et du Fonds de solidarité. Il entretenait aussi des relations avec des membres des Hells Angels et avec le caïd Raynald Desjardins.

Le coaccusé de Lafortune dans le dossier fiscal qui vient d'être ouvert à Laval, Yannick Payette, est aussi son ancien partenaire dans un centre de prêts privé qui a fermé ses portes depuis. À la commission Charbonneau, la preuve avait démontré que l'homme utilisé par le duo comme collecteur de dettes était un violent criminel de carrière, mort aujourd'hui

Pour le moment, aucune date n'a été fixée pour le procès.