Des Hells Angels auraient financé la livraison par drone d'une importante quantité de tabac de contrebande à l'Établissement à sécurité moyenne Archambault, à Sainte-Anne-des-Plaines, il y a un an.

C'est du moins ce que soutiennent les autorités carcérales en dépit des dénégations de l'un des motards qui auraient été impliqués. Ce dernier conteste d'ailleurs son transfert au pénitencier à sécurité maximale de Donnacona, qui a suivi l'événement.

Le motard en question, Pierre Hamilton, 48 ans, membre des Hells Angels de la section de Québec, a présenté une requête en habeas corpus en Cour supérieure, en janvier dernier, dans le but de retourner dans un établissement à sécurité moyenne.

Des rapports de renseignements qui accompagnent la requête que La Presse a obtenus indiquent que le 20 mai 2014, vers 21 h 30, au moins un détenu a vu un appareil de type hélicoptère téléguidé, « auquel un paquet enveloppé gros comme une boîte de conserve » avait été attaché, atterrir dans la cour du pénitencier.

Peu après, une autre source a indiqué aux gardiens que le soir du 20 mai, une personne aurait utilisé, pour livrer de la contrebande, « un appareil de type drone contrôlé à distance par un portable, pouvant soutenir un objet d'environ 12 livres, très silencieux et capable de voler à une hauteur dépassant les tours » de garde du pénitencier.

Selon d'autres informations, la marchandise, qui n'a pas été retrouvée, était composée de blagues de tabac en vrac d'un poids de 50 grammes chacune. Le tout vaudrait, a-t-on estimé, 24 000 $ sur le marché noir en établissement.

D'après les documents, au moins trois informateurs ont désigné quatre personnes comme les responsables de cette livraison :  Éric Bertrand, un détenu, qui aurait été commandité par deux membres en règle des Hells Angels de Québec, Pierre Hamilton et Claude Demers, et un ancien membre de ce groupe de motards condamné après la tuerie de Lennoxville en 1985, Jacques Pelletier.

Dans le dossier, il est précisé que Pelletier a été mis en garde après l'acte de contrebande, alors que Hamilton, Demers et Bertrand ont été « remontés » dans un pénitencier à sécurité maximale.

Besoin d'encadrement

Hamilton nie être impliqué dans cette affaire. Il y a quelques jours, la juge Hélène Di Salvo a accueilli sa requête et son avocate pourra bientôt interroger quatre témoins, vraisemblablement des employés des services correctionnels en poste à l'Établissement Archambault.

Les services correctionnels s'opposent à ce que Hamilton soit « redescendu » dans un établissement à sécurité moyenne, car ils estiment que le risque de récidive est élevé et qu'il serait mieux encadré dans un pénitencier à sécurité maximale.

« Monsieur était une source d'intérêt depuis quelques mois en lien avec l'entrée de tabac et le trafic institutionnel. Force est d'admettre que le moyen utilisé pour mener cette entrée de substances interdites en établissement démontre le côté structuré, organisé et planifié, et ceci constitue un élément préoccupant dans la gestion du risque d'un établissement et des personnes s'y trouvant », peut-on lire dans le rapport d'un agent de libération rédigé il y a un an.

Après l'épisode du drone, Hamilton a été placé en isolement à Archambault, en attendant d'être transféré à Donnacona. Il a affiché un comportement conformiste, mais des informations sur du trafic illicite sont apparues dans son dossier en décembre 2013. Il occupait un emploi de jardinier à l'Établissement Archambault avant son transfert dans un établissement à sécurité maximum.

Drones

Selon un rapport obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information en avril dernier, six pénitenciers ont reçu la visite de drones en 2013 et 2014 au Canada, dont deux au Québec (Drummondville et Archambault). Entre janvier 2011 et juin 2014, deux drones ont été observés au-dessus d'établissements québécois et trois autres ont été saisis par les autorités. Selon des chiffres de 2012 obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information, la contrebande de tabac était sur le point de supplanter le trafic de drogue dans les pénitenciers.