L'enquête sur le meurtre du mafieux Tonino Callocchia, tué hier dans un café du quartier Rivière-des-Prairies, s'annonce particulièrement ardue pour les enquêteurs des Crimes majeurs de la police de Montréal. Les assassinats dans le milieu de la mafia, on le sait, sont généralement difficiles à élucider, mais le nom de Callocchia, 53 ans, résonnait dans toutes sortes de contextes depuis plusieurs mois.

Il y a quelques jours, son nom avait été chuchoté à l'oreille de La Presse dans une conversation portant sur de nouvelles tensions au sein de la mafia, « parce que des ententes conclues après le retour de Vito Rizzuto n'auraient pas été respectées », nous avait-on alors dit. 

Tonino Callocchia a commencé à en mener large au sein de la mafia montréalaise avant même la libération du parrain à l'automne 2012, et il a continué à prendre de plus en plus de place après le retour de Vito Rizzuto à la tête de la pyramide mafieuse, tellement que La Presse avait même évoqué son nom comme un successeur possible après la mort naturelle du parrain, en décembre dernier.

Selon nos informations, Callocchia aurait été assis à la table de direction de la mafia mise en place après la mort de Vito Rizzuto. Il était très proche du nouvel homme fort qui a pris la relève dans le secteur Rivière-des-Prairies à la suite du meurtre du chef de clan Giuseppe De Vito au pénitencier de Donnacona en 2013.

Officiellement entrepreneur en construction, il aurait été mêlé à des importations de cocaïne et aurait eu récemment maille à partir avec un autre chef de clan pour le contrôle de la vente de stupéfiants dans des territoires situés dans le nord-est de Montréal.

D'autres informateurs nous ont confié que Callocchia aurait cherché à prendre le contrôle du prêt d'argent dans les secteurs de Laval et de l'est de Montréal, en particulier depuis le meurtre d'un autre prêteur dont il a été proche, Roger Valiquette, tué à Laval en décembre dernier.

Le nom de Callocchia a également été entendu au début de l'année, au sujet d'un attentat raté commis contre un membre du clan de Vittorio Mirarchi, protégé du caïd Raynald Desjardins. Il est aussi question d'une dette contractée l'an dernier.

Enfin, Callocchia, qui a déjà été proche des frères Arcuri, du moins à une certaine époque, faisait toujours face à une cause pendante d'intimidation et d'extorsion envers Marlène Girard, présidente d'ECN Sol et proche de Raynald Desjardins. Pas plus tard que la semaine dernière, il s'est présenté au palais de justice de Montréal pour cette cause. Son avocat a demandé au juge de permettre à son client de partir pour retourner s'occuper de ses employés sur un chantier.

Rattrapé par le destin

Le 1er février 2013, Callocchia avait miraculeusement échappé à une tentative de meurtre survenue dans le stationnement d'un restaurant de Laval, où il se rendait pour une rencontre avec un membre de la famille Arcuri et un blanchisseur d'argent.

Mais la mort l'a rattrapé vers 13 h hier, lorsque deux hommes vêtus d'une cagoule et armés ont fait irruption dans le bistrot XO, situé sur le boulevard Henri-Bourassa, où il se trouvait. Ils ont tiré plusieurs balles en sa direction, l'atteignant à la tête, avant de fuir.

Ce meurtre s'inscrit dans la plus pure tradition du crime organisé et a vraisemblablement nécessité un feu vert, compte tenu de l'importance de la victime sur l'échiquier de la mafia. Callocchia avait de lourds antécédents judiciaires, en matière d'importation de cocaïne notamment. Il avait été condamné à 10 ans de pénitencier en 1998.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Tonino Callocchia a été photographié par La Presse à sa sortie de l'église, lors des funérailles de Vito Rizzuto en décembre dernier.