Le pilote d'hélicoptère qui a été forcé, il y a 15 mois, de poser son appareil sur le toit de la prison de Saint-Jérôme pour permettre l'évasion de Benjamin Hudon-Barbeau et d'un complice se désole que le gouvernement n'ait encore rien fait pour empêcher pareil scénario de se reproduire.

«J'aurais aimé voir être installés, à la suite de l'évasion de Saint-Jérôme, des filets antiaériens, ou des câbles d'acier qui passent par-dessus les bâtiments. Ça empêcherait des hélicoptères de s'en approcher», affirme Sébastien Foray.

«La zone d'exclusion aérienne au-dessus des prisons fédérales, et qui est demandée par Québec pour ses prisons, reste une frontière imaginaire qui peut être traversée. Je trouve la question un peu ridicule. Pour des gens qui commettent tous ces gestes illégaux pour s'évader, traverser un espace aérien interdit, c'est le dernier de leurs soucis», souligne-t-il.

Depuis cette journée qui a changé sa vie, le jeune Français a étudié plusieurs cas d'évasion similaires ailleurs dans le monde.

«Près de chez moi, en Savoie, il y a eu une évasion en hélico il y a quelques années. Rapidement, des câbles ont été installés au-dessus de la prison. Je les ai vus en y allant pendant mes vacances», raconte le pilote, dont la carrière est au ralenti depuis les événements. Il a même brièvement perdu sa licence, car il a dû démontrer à Transports Canada que sa condition psychologique lui permettait de piloter un appareil.

Le 17 mars 2013, deux fier-à-bras sont montés dans son hélicoptère de la société Passport Hélico, à Mont-Tremblant, prétextant vouloir faire un vol touristique au-dessus des Laurentides. Mais après le décollage, l'un d'eux a dégainé son pistolet et le lui a mis sur la tempe. Il a dû retirer son casque d'écoute et son micro, puis foncer vers la prison de Saint-Jérôme. Il a posé son Robinson 44 - le même modèle qui aurait été utilisé le week-end dernier à Québec - sur le toit de la prison. Hudon-Barbeau et un autre détenu se seraient accrochés à des cordes lancées de l'aéronef par leurs complices.

Il s'est ensuite envolé, difficilement, «l'adrénaline à fond», pour les déposer à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson. Les fugitifs ont été capturés quelques heures plus tard.

Avant d'arriver à la prison, M. Foray a prétexté qu'à l'approche de Mirabel, il devait signaler sa présence à la tour de contrôle de l'aéroport, faute de quoi une alerte serait donnée. Les deux bandits ont hésité, puis l'ont laissé faire. Il a donné un code avertissant les autorités que son hélicoptère avait été détourné. L'alerte a donc été vite donnée.

Ça ne semble pas avoir été le cas à Québec, où les fuyards détenaient une avance plus importante sur la police. Sébastien Foray, chez qui ce nouveau coup d'éclat ravive d'intenses émotions, croit que le pilote était forcément complice des fugitifs.

«Si un hélico avait disparu dans une compagnie, on le saurait», affirme-t-il.

«Et une fois l'hélico en vol, ce n'est pas très difficile de le faire disparaître. Un pilote peut éteindre les dispositifs qui permettent d'identifier la machine. Des radars verront un petit point, mais sans informations sur sa nature. On peut aussi camoufler le numéro d'immatriculation, on peut faire beaucoup de kilomètres sans se signaler. Et une fois sorti de la zone métropolitaine de Québec, on peut voler au ras des arbres et des montagnes, sans être vu, se poser près d'un chalet perdu et même cacher l'appareil sous une bâche, il n'est pas très gros», conclut-il.

L'hélicoptère s'est posé dans la cour pour cueillir les trois détenus.

2. MIRADOR

Un garde équipé d'une radio surveillait la cour du haut du mirador.