Détenu depuis neuf ans pour avoir tué deux hommes à coups de bâton de baseball et de poêle, celui qui a été surnommé le «docteur des Hells Angels» lutte contre le système carcéral pour effacer toute référence au gang de motards dans son dossier.

François Ménard a été médecin à Sorel-Tracy pendant plusieurs années avant de sombrer dans la criminalité, dans les années 90, et d'être radié à vie du Collège des médecins.

En 2005, il a été reconnu coupable du meurtre non prémédité, commis en 1996, de Thanh Chi An, prêteur usuraire auprès duquel il avait contracté des dettes de jeu. L'arme du crime était une poêle en fonte. Il a été condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans.

En 2006, 17 ans de prison se sont ajoutés pour l'homicide involontaire de Richard Poirier, une relation des Hells Angels, en 1999. Ménard était propriétaire d'une plantation de marijuana et soupçonnait Poirier de voler de la drogue. Ménard et deux complices l'ont roué de coups de bâton de baseball dans un champ. Le lendemain, ils sont revenus, l'ont trouvé mort et l'ont enterré.

Ménard a été arrêté plusieurs années plus tard.

Le «docteur des Hells Angels»

Du temps de sa pratique médicale, il a eu comme patients des membres des Hells Angels et leurs proches. Ce qui lui a valu le sobriquet de «docteur des Hells Angels».

Quand il est arrivé en prison, après sa condamnation pour meurtre, l'étiquette des Hells lui a collé à la peau. Si bien qu'il a vainement déposé des griefs pour faire disparaître de son dossier toute référence à ce groupe de motards. L'affaire s'est récemment retrouvée devant la Cour fédérale. «Le 25 mai 2005, le [Service correctionnel du Canada (SCC)] a informé le demandeur [Ménard] par écrit qu'il avait été identifié comme une relation des Hells Angels Québec, connu comme «médecin spécial» des Hells Angels», lit-on dans le récent jugement fédéral, qui indique que l'information venait de la Sûreté du Québec (SQ).

Ces informations ont servi au SCC pour établir la «cote de sécurité» de Ménard et ainsi déterminer dans quel type de pénitencier il purgerait sa peine.

«Le demandeur a nié par écrit toute association avec les Hells Angels mis à part le fait d'avoir traité quelques membres de ce groupe à titre de médecin», stipule le jugement.

En 2008, François Ménard a été informé par le SCC qu'il n'était plus considéré comme un membre des Hells.

«Depuis bientôt trois ans, Ménard est dans un secteur à contact restreint, il n'habite plus dans le secteur où se trouvent en majorité les sympathisants de ce gang. Aucun contact téléphonique ou courrier [n'a été échangé] entre les parties», stipulait la Fiche d'information de cessation d'appartenance ou d'association à une organisation criminelle, qu'il a alors reçue.

Mais le SCC a continué de tenir compte de son affiliation passée dans ses documents le concernant. Il veut que cela cesse et il juge les informations de la SQ peu fiables. D'où ses griefs et le jugement récent.

«Il demeure loisible au demandeur de prétendre, considérant le manque d'éléments de preuve à l'appui, que peu de valeur probante devrait être accordée à la conclusion selon laquelle il était à une certaine époque affilié aux Hells Angels si le SCC ou toute autre organisation tente de s'appuyer sur son dossier carcéral pour établir ce fait», écrit la juge Gleason, qui rejette toutefois ses griefs.