L'accident qui aurait pu coûter la vie à Steven Bertrand, mercredi, au palais de justice de Maniwaki, aurait assurément pu être évité si le constable spécial qui a ouvert le feu sur lui n'avait pas été seul, affirme le président du syndicat des constables spéciaux, Franck Perales.

Le jeune homme de 18 ans se serait emparé du bâton du constable et l'aurait frappé à une reprise. L'agent a tiré un coup de feu afin d'éviter un deuxième contact.

Steven Bertrand se trouve toujours aux soins intensifs de l'hôpital de Gatineau, mais on ne craindrait pas pour sa vie. La mère de Steven Bertrand a écrit sur sa page Facebook mercredi soir que la balle n'avait pas touché le cerveau et que le jeune homme «se bat pour sa vie». Elle a publié jeudi des photos où l'on voit son fils couché sur son lit d'hôpital, intubé et portant une minerve au cou.

Quant au constable spécial, il est rentré à la maison après avoir été hospitalisé.

« S'il y avait eu deux constables, ils l'auraient probablement immobilisé puis lui auraient passé les menottes comme le veut la procédure, et cet événement malheureux ne serait pas arrivé », a dit M. Perales à La Presse. Les constables spéciaux du gouvernement du Québec sont des agents de la paix assermentés devant un juge.

« Sur la vidéo, on entend le constable demander qu'on appelle la police, il ne dispose d'aucun renfort », a-t-il poursuivi.

Une situation « exceptionnelle »

La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a tenu à rappeler que l'événement qui a secoué hier le palais de justice de Maniwaki, où elle a travaillé pendant 12 ans, était de nature « exceptionnelle ».

« Il ne faudrait pas que les gens s'imaginent que c'est la réalité de Maniwaki. Oui, c'est une communauté qui vit ses difficultés, mais ce n'est pas vrai qu'il y a de la violence comme ça dans ce milieu », a-t-elle dit, jeudi, à sa sortie du caucus libéral d'avant session, à Québec.

Des effectifs supplémentaires venant à la fois du ministère de la Sécurité publique et du ministère de la Justice ont été envoyés sur place, jeudi, afin d'épauler ceux qui travaillent au palais de justice de Maniwaki.

Quand elle a été informée, mercredi, de l'événement impliquant Steven Bertrand et un constable spécial, la ministère Vallée a reçu l'information « avec beaucoup d'émotions ».

« C'est le palais de justice où j'ai fait mes premiers pas. C'est le palais de justice où j'ai travaillé pendant 12 ans. C'est le milieu où j'ai habité pendant 20 ans. C'est la clientèle qui était la mienne. Ce sont des gens qui oeuvrent au palais de justice qui sont des connaissances, des gens de qui je suis près à plusieurs niveaux », a-t-elle illustré.

« C'est venu me chercher dans le plus profond de ce que j'ai. Par la suite, j'ai vu la vidéo (...). Je suis mère de jeunes de 18 et 20 ans, je suis avocate qui a pratiqué en région, alors c'est certain que ça me touche beaucoup », a poursuivi Mme Vallée, affirmant qu'elle ne commenterait pas davantage le cas puisque le BEI fait enquête.

Manques d'effectifs ? 

Voilà plusieurs années que les constables spéciaux font des demandes auprès du gouvernement du Québec pour que des effectifs plus importants leur soient attribués dans les palais de justice de la province.

Dans bien des endroits, le constable spécial doit assurer la sécurité de tout l'établissement, « pas juste la salle de cour », rappelle M. Pareles du syndicat des constables spéciaux. Ils sont assistés par des agents de sécurité, mais ces derniers « ne possèdent pas la formation ni l'équipement nécessaire » pour les interventions plus importantes, comme c'est arrivé à Maniwaki, quand un prévenu s'emporte et doit être immobilisé.

« Le gouvernement a mis des agents de sécurité pour donner une impression de sécurité, mais ce n'est pas le cas », déplore Frank Pareles, qui se désole qu'un incident « soit nécessaire pour que les choses bougent ».

- Avec La Presse canadienne