L'homme d'affaires Tony Accurso a tenté de faire cesser les procédures entamées contre lui dans l'affaire des contrats publics de la ville de Mascouche, en vain.

L'entrepreneur a présenté une requête en arrêt des procédures en vertu de l'Arrêt Jordan de la Cour Suprême du Canada - qui limite à 30 mois les délais judiciaires pour les procès devant jury - mais le juge Daniel W. Payette de la Cour Supérieure l'a rejetée le 22 novembre. La décision faisait toutefois l'objet d'un interdit de publication jusqu'à ce que des avocats de médias, dont La Presse, réussissent à faire lever une partie de l'interdiction aujourd'hui. La décision est toutefois toujours partiellement caviardée.

Rappelons qu'Accurso, qui est accusé de fraude, complot, corruption et abus de confiance, a été arrêté en même temps qu'une quinzaine d'autres personnes le 17 avril 2012 à la suite d'une enquête menée par la Sûreté du Québec sur l'octroi de contrats publics à la Ville de Mascouche.

La dénonciation fait état d'un système de corruption qui impliquerait des élus et des fonctionnaires municipaux de Mascouche d'une part, et des entrepreneurs et des firmes de génie d'autre part. Ces derniers auraient offert des avantages aux premiers pour l'obtention de lucratifs contrats municipaux ou intermunicipaux en échange de financement du parti politique du défunt maire Richard Marcotte ou de cadeaux.

Toutefois, Tony Accurso n'est pas visé par les allégations reliées au financement du parti politique du maire. En revanche, la Poursuite lui reproche d'avoir amené M. Marcotte sur son yacht à trois reprises, en présence de l'entrepreneur Normand Trudel à l'une des occasions. Elle argue également que Tony Accurso est associé dans une entreprise, Ecolosol inc., avec M. Trudel, qui lui serait impliqué dans le financement du parti du maire, selon la Poursuite.

Bras de fer

Les procédures sont en cours depuis cinq ans et Accurso a notamment affirmé dans sa requête en arrêt des procédures que la complexité du dossier ne justifie pas le dépassement des délais et que la Couronne aurait dû le poursuivre seul, étant donné que les gestes qu'on lui reproche sont spécifiques et ne s'inscrivent pas dans la théorie d'un complot principal.

Pour sa part, la Poursuite a répliqué que l'homme d'affaires a participé aux délais encourus et à la complexité de l'affaire par des demandes exhaustives de divulgation. Elle a ajouté qu'il y avait lieu d'appliquer une mesure transitoire exceptionnelle étant donné que l'affaire était déjà en cours au moment où l'Arrêt Jordan a été prononcé.

Dans sa décision, le juge statue que le délai entre le dépôt des accusations et la conclusion anticipée du procès - qui a été fixé à janvier prochain - s'élève à 70 mois.

Après avoir analysé le contenu de chacune des audiences et les démarches des parties à chacune des étapes, il conclut que 22 mois sont imputables à la Défense, ce qui donne un délai résiduel de 48 mois.

Le magistrat considère toutefois l'affaire comme étant complexe, et énumère la communication d'une preuve volumineuse, le grand nombre de témoins, des témoignages d'experts à venir, la longue période sur laquelle se sont échelonnés les actes reprochés, le grand nombre d'accusations, de demandes préalables au procès et de questions litigieuses.

Il conclut également, sans blâmer Tony Accurso, que certaines de ses actions ou inactions ont eu un impact sur le déroulement du dossier.

L'Arrêt Jordan prévoit une mesure transitoire exceptionnelle qui permet un dépassement des délais et le juge a conclu qu'elle s'appliquait ici. Cette requête en arrêt des procédures a été débattue les 13 et 14 septembre derniers.

Rappelons que le procès pour fraude et corruption que l'homme d'affaires subissait à Laval a avorté le 17 novembre dernier.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le (514) 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.