L'interminable saga judiciaire de l'ancien agent correctionnel Pierre-Arold Agnant, accusé en 2007 d'avoir fait entrer de la drogue à la prison de Bordeaux pour un gang de rue, devrait se conclure à l'automne 2018. L'homme de 54 ans a renoncé hier à sa liberté jusqu'à son second procès, sept ans après la fin du premier, torpillé par l'« incompétence » rarement vue de son avocat.

JUGÉ À NOUVEAU EN NOVEMBRE

Arrivé au palais avec sa famille, vêtu d'un large veston bleu, Pierre-Arold Agnant s'est fait passer les menottes à sa demande hier matin au palais de justice de Montréal. Au fond de la salle, trois membres de sa famille peinaient à retenir leurs larmes en voyant leur proche prendre le chemin de la prison après six ans de liberté. L'ex-agent correctionnel Pierre-Arold Agnant subira ainsi son second procès le 7 novembre 2018. Mais cette fois, à peine un jour d'audition est prévu pour cette prise deux du procès. L'accusé avait été libéré sous conditions en juin 2011 pendant les procédures d'appel de son premier procès qui avait duré quelques semaines.

SÉVÈRES ACCUSATIONS 

L'ancien agent des Services correctionnels fait face à de sévères chefs d'accusation : complot, trafic de stupéfiants sous la direction d'une organisation criminelle et corruption de fonctionnaires. De décembre 2006 à juin 2007, Pierre-Arold Agnant aurait introduit des kilos de drogue à l'Établissement de détention de Montréal (Bordeaux), dont de la cocaïne et du crack, pour le compte d'un gang de rue d'allégeance bleue. Il avait alors sept ans d'expérience comme agent correctionnel. L'ex-agent et plusieurs détenus de la prison avaient été arrêtés au terme d'une longue et complexe enquête de la Sûreté du Québec.

AVOCAT « INCOMPÉTENT »

En décembre 2009, Pierre-Arold Agnant avait été reconnu coupable par un jury, puis condamné à purger huit ans de pénitencier. Or, en mars 2015, la Cour d'appel du Québec a cassé ce verdict de culpabilité et a ordonné la tenue d'un second procès pour une raison inédite au Canada: l'incompétence hors du commun de son avocat. « Rarement l'incompétence d'un avocat aura-t-elle été aussi criante qu'en l'espèce. Elle est la cause d'un procès injuste et inéquitable, et ce, indépendamment de la fiabilité du verdict », écrivait le banc de trois juges dans sa décision.

RADIATION PROVISOIRE

L'avocat de Pierre-Arold Agnant, Max Stanley Bazin, était si incompétent qu'il avait été radié provisoirement par le Barreau du Québec en décembre 2009 en plein procès, au début des plaidoiries sur la peine à imposer. « Par son ignorance marquée et généralisée des règles élémentaires du droit criminel, il a irrémédiablement saboté la défense de l'appelant », écrit la Cour d'appel. Pendant le procès, un membre du jury avait même questionné la juge France Charbonneau sur la performance de l'avocat. Ce cas « exceptionnel » représente « sans doute une première au Québec, sinon au Canada », soulignent les juges de la Cour d'appel. Max Stanley Bazin n'a plus pratiqué depuis.