Deux ans après sa mort en détention au Panama, la justice québécoise a finalement obtenu copie du certificat de décès d'Arthur Porter, ce qui permet de mettre fin officiellement au processus judicaire contre le dirigeant hospitalier accusé d'avoir été derrière « la plus grande fraude de corruption de l'histoire du Canada ».

Le certificat de décès de l'ancien patron du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), dont La Presse a obtenu copie, a été déposé à la cour vendredi matin. 

Le document rédigé en espagnol situe l'heure du décès à 11h05, le 30 juin 2015. La cause de la mort identifiée par le médecin légiste est un adénocarcinome pulmonaire (une tumeur maligne) avec métastases multiples. Le détenu avait été transféré de la prison de La Joya vers un hôpital oncologique avant son décès, vue la dégradation de son état de santé. 

Arthur Porter disait combattre un cancer depuis longtemps lorsqu'il avait été capturé à la demande des autorités canadiennes, pendant un transfert d'avion au Panama. Ses nombreux mensonges passés démasqués au fil des ans avaient toutefois poussé certains observateurs à douter de l'authenticité de son autodiagnostic. 

Des policiers québécois de l'Unité permanente anticorruption avaient été dépêchés en Amérique centrale après le décès de leur suspect pour s'assurer qu'il ne s'agissait pas d'une nouvelle ruse. Après avoir eu accès au corps, ils s'étaient montrés convaincus qu'il était bien mort. L'arrêt du processus criminel avait toutefois attendu l'obtention du document officiel. 

Dans les hautes sphères

Originaire du Sierra Leone, Arthur Porter avait réussi à se bâtir une véritable légende après être arrivé au Québec pour prendre la direction du CUSM. Il avait été nommé par le gouvernement conservateur au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Air Canada l'avait invité à siéger sur son conseil d'administration. Porter avait même enregistré une entreprise privée de consultants avec Philippe Couillard, lorsque celui-ci avait quitté momentanément la politique. 

À la fin 2011, la vérité avait commencé à émerger. 

Arthur Porter a quitté le CUSM après que le National Post a révélé ses tractations ratées avec Ari Ben Menashe, un lobbyiste installé à Montréal qui a été agent israélien avant de représenter le gouvernement russe et qui a été mêlé à des histoires de trafic d'armes.

M. Porter avait reconnu avoir donné 200 000 $ au lobbyistes pour obtenir des investissements russes dans son entreprise en Afrique. Des liens délicats pour quelqu'un qui siégeait sur un comité d'examen des activités de renseignement canadiennes. 

Dans la foulée de cette affaire, un sénateur conservateur a révélé que Porter lui avait offert un poste de consul honoraire de la Sierra Leone.

Des millions en pots-de-vin

Porter a laissé le CUSM dans un véritable gouffre financier. Peu après, une enquête de l'UPAC a mené au dépôt d'accusations criminelles contre l'ancien directeur, qui aurait accepté des millions de dollars en pots-de-vins de SNC-Lavalin pour truquer l'appel d'offre pour la construction du nouveau superhôpital. 

Un enquêteur de l'UPAC avait expliqué à la Commission Charbonneau qu'il s'agissait de «la plus grande fraude de corruption de l'histoire du Canada», au pro rata de la valeur du contrat. 

Un ancien bras droit d'Arthur Porter au CUSM et d'anciens dirigeants de SNC-Lavalin sont toujours en attente de procès dans cette affaire.

Certificat de décès d'Arthur Porter