Condamnée en mai dernier à payer 24 000 $ au maire de Brossard Paul Leduc pour diffamation, l'ex-députée libérale Fatima Houda-Pepin était de retour devant les tribunaux, hier matin, pour demander l'autorisation de porter l'affaire en appel.

C'est l'avocat Julius Grey qui la représentait. Il a fait valoir devant la juge Marie St-Pierre, du plus haut tribunal de la province, que l'affaire allait au-delà du simple conflit entre deux personnes, qu'il s'agissait d'une «question de grand intérêt public».

«En temps de campagne électorale, y a-t-il une grande liberté de dire des choses négatives?, a demandé l'avocat. Si on veut avoir une vraie démocratie, on ne peut pas tamiser le discours. Il doit y avoir un haut niveau de tolérance pour avoir une campagne vigoureuse.»

Rappelons qu'au terme d'un procès de plusieurs jours, Mme Houda-Pepin a été condamnée par la Cour du Québec à verser 20 000 $ à titre de dommages moraux et à 4000 $ à titre de dommages punitifs pour avoir diffamé le maire de Brossard, Paul Leduc, dans les jours qui ont précédé les élections provinciales de 2014.

Fatima Houda-Pepin, qui a été députée de la circonscription de La Pinière entre 1994 et 2014, était en campagne contre l'actuel ministre de la Santé Gaétan Barrette. Elle se présentait comme candidate indépendante après avoir été exclue du caucus libéral.

Durant la campagne, elle a déclaré dans plusieurs médias que le maire Paul Leduc livrait au Dr Barrette une élection «clés en main», qu'il avait donné comme instruction aux membres de son parti de travailler pour le candidat et qu'il utilisait des «prête-noms».

Tout cela s'est révélé faux.

«Insinuation de corruption»

Dans son jugement de mai, la juge Chantale Sirois, de la Cour du Québec, a écrit : «Cela constitue une faute grave d'avoir formulé pareille allégation à plusieurs reprises, pendant plusieurs jours, notamment en la diffusant sur son site web pendant plusieurs semaines. [...] Il s'agit là d'une attaque directe à l'honnêteté de Paul Leduc, une insinuation de corruption».

La juge avait toutefois souligné à gros trait que Mme Houda-Pepin avait été provoquée, un argument saisi au bond par Julius Grey. Durant la campagne, le maire Leduc a envoyé à un média local une lettre ouverte intitulée «Pourquoi j'appuie Gaétan Barrette», dans laquelle il dénonçait le travail de la députée.

Selon ce que l'avocat de cette dernière a plaidé hier devant la Cour d'appel, cette provocation aurait dû être prise en compte par la juge de première instance lorsqu'elle a déterminé la faute.

L'avocat du maire de Brossard, Rafaël Primeau-Ferraro, a pour sa part insisté sur le fait que les allégations avaient été très dommageables pour son client, surtout dans un contexte où la commission Charbonneau était en cours. «Les mots qu'elle a utilisés étaient très connus des gens au Québec.»

La juge Marie St-Pierre annoncera le 9 août si elle accueille la cause en appel.