Les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) devront cesser de tapisser leurs voitures d'autocollants pour protester contre le coût de leur régime de retraite. Un arbitre du travail donne raison à la Ville de Montréal, qui demandait la fin de ce moyen de pression entrepris voilà deux ans et demi.

En juin 2014, le dépôt du projet de loi pour revoir le partage du coût des régimes de retraite des employés municipaux avait mis le feu aux poudres dans le milieu municipal. La réaction avait été particulièrement forte chez les policiers de Montréal, qui voyaient d'un seul coup leurs cotisations doubler pour obtenir en fin de compte un fonds de pension moins généreux.

Rapidement, la Fraternité des policiers et policières de Montréal a entrepris des moyens de pression. Les policiers ont ainsi commencé à porter des casquettes rouges et ont remisé leurs pantalons de travail pour des cargos de camouflage ou fluorescents.

Puis, le 15 juillet 2014, des milliers d'autocollants ont commencé à faire leur apparition sur les véhicules de patrouille ainsi que sur les portes et fenêtres des postes de quartier. La Ville en a recensé pas moins de 5825 en quelques jours à peine. Tous les véhicules du SPVM ont été touchés, y compris le poste de commandement, les motocyclettes, les triporteurs de l'aéroport et même certains véhicules fantômes.

Certains policiers ont été particulièrement inspirés, laissant libre cours à leur créativité. Des agents ont ainsi créé des dessins, comme des flammes, un signe de Superman ou des mots comme « Coderre voleur ». Apposés pratiquement partout, des autocollants se trouvaient même à l'intérieur des véhicules, notamment sur le tableau de bord et sur l'ordinateur de bord.

Montréal avait mis en demeure la Fraternité de retirer les autocollants, mais celle-ci avait refusé. Les 540 véhicules du SPVM ont également été nettoyés les 23 et 24 juillet 2014, mais les autocollants sont aussitôt réapparus. Excédée, la Ville de Montréal a déposé un grief le 26 août 2014.

Dans son grief, Montréal indique que « la Ville n'accepte pas que des manifestants puissent apposer des autocollants sur la propriété d'autrui. Lorsque cela se produit, cela peut justifier des arrestations ainsi que le dépôt d'accusations de méfait ».

Dans sa décision rendue le 29 décembre, l'arbitre qui a tranché le grief donne raison à la Ville. Il ordonne ainsi aux policiers de cesser d'apposer des autocollants sur les véhicules et immeubles du SPVM. Celui-ci juge notamment que ce moyen de pression nuit à l'efficacité du corps policier, notamment lorsque des autocollants sont apposés sur les véhicules fantômes ou lorsque ceux-ci cachent des numéros d'identification.

À noter, l'arbitre ne s'est pas prononcé sur l'apposition d'autocollants sur les gilets pare-balles des policiers, la Ville n'ayant présenté aucune preuve à ce sujet. 

Dans sa décision, l'arbitre estime que la Fraternité devra dédommager Montréal pour les frais de nettoyage, mais se garde d'établir un montant, invitant les deux parties à s'entendre. Il refuse toutefois d'accorder des dommages exemplaires à la Ville, puisque ces gestes font partie du droit à la liberté d'expression de la Fraternité.

Dans sa plaidoirie, Montréal avait chiffré à tout près de 24 000 $ la facture pour le nettoyage de ses véhicules entre juillet 2014 et janvier 2015.

La Fraternité a dit avoir pris acte de la décision et demandé à ses membres de cesser d'apposer de nouveaux autocollants. Elle étudie toutefois la possibilité de contester la décision arbitrable.

La Ville de Montréal s'est réjouie de cette décision. « La Ville est soulagée de savoir que ce sera la Fraternité, et non les contribuables, qui devra payer le coût des dommages causés par l'apposition massive de ces autocollants », a indiqué par courriel Gonzalo Nunez, porte-parole municipal.