Philistin Paul, considéré par la police comme l'un des plus influents membres des Rouges de Montréal, dit vouloir se dissocier des gangs de rue.

Paul, 36 ans, a manifesté ses intentions, hier, durant son audience devant les commissaires aux libérations conditionnelles. Le détenu a beau avoir admis qu'il est devenu un joueur de poker derrière les murs, les commissaires l'ont visiblement soupçonné de ne pas jouer cartes sur table et ont refusé sa demande de purger la suite de sa peine en maison de transition. D'ailleurs, son agente de libération ne recommandait pas sa libération, « en raison des risques de récidive élevés ».

Philistin Paul, alias Crazy, a été condamné à huit ans de pénitencier en 2010, après avoir ouvert le feu en direction de Beauvoir Jean, un ancien chef de gang devenu travailleur de rue. L'événement est survenu en plein jour, devant plusieurs témoins. En remettant l'arme dans son pantalon, Paul s'est tiré accidentellement dans une cuisse.

« Beauvoir est mon ami. Je le connais depuis 25 ans. Il venait à mon restaurant. Il a eu une altercation avec un autre ami, et j'ai voulu m'interposer », a raconté Paul.

Plus besoin des gangs

Provenant d'une famille de 14 enfants, dont 9 garçons, ayant vécu dans la pauvreté, Philistin Paul a eu une carrière criminelle précoce après avoir abandonné l'école au début du secondaire. « Quand je regarde ça aujourd'hui, j'aurais dû continuer l'école. Mais maintenant, il est trop tard. Je ne reviendrais pas en arrière », a-t-il dit.

Paul admet avoir été membre d'un gang de rue d'allégeance rouge et avoir « joué du gun » à une certaine époque, mais il dit qu'il n'est plus intéressé aujourd'hui. « La violence, c'est ce que j'ai connu. Quand tu es dans le milieu, tu crois que tu ne te feras jamais arrêter. Tu penses à toi, pas aux autres.

« Aujourd'hui, je n'ai pas besoin d'aller vendre de la drogue. Je dirais non à retourner dans les gangs. Tout cela ne sert à rien. Je l'ai réalisé tard. Je ne me tiens pas avec des gars de gangs de rue même si c'est rouge dans mon pénitencier. Je ne suis jamais avec eux, je ne m'entraîne pas et je ne mange pas avec eux. Je n'appelle pas à l'extérieur pour avoir des nouvelles. Je reste tranquille. »

Doute des commissaires

Mais les chefs de gangs les plus influents à Montréal ont actuellement son âge et pourquoi ne serait-il pas tenté de reprendre le flambeau une fois libéré ?, lui ont lancé les commissaires. « J'ai vu qu'il y a autre chose que de faire mal aux gens », a répondu Paul, selon qui les gangs ont bien changé et « que beaucoup de monde est mort ».

À deux reprises, Paul a été « remonté » dans un maximum depuis son incarcération pour divers manquements disciplinaires et une bagarre entre détenus. Mais il a un bon comportement depuis l'an dernier et a suivi avec succès un programme contre la violence. Fait à noter, il n'a reçu aucune visite au pénitencier depuis septembre 2013.

Une fois libéré, il songe à devenir signaleur routier, mais son plan de sortie n'a pas impressionné les commissaires.

« Vous semblez avoir de bonnes intentions et vous avez fait des efforts, mais pas suffisamment. À votre libération, il sera difficile pour vous de refuser des offres, une fois équipé comme vous l'êtes actuellement », ont déclaré les commissaires en refusant sa demande. Paul sera libéré d'office l'an prochain.

Philistin Paul

• Originaire de Montréal-Nord

• Ancien membre des Bad Boys, Blood Mafia Family et Bo-Gars, de la famille des Bloods (Rouges)

• Considéré comme faisant partie du noyau dur des Rouges

• Au milieu des années 90, il se retrouve au coeur d'une dispute sanglante avec un gang rival, les Crack Down Posse (CDP).

• 1998: Il est arrêté avec d'autres Rouges avant la Carifête car la police craint des règlements de comptes. Une arme de calibre .12 tronçonnée est saisie, mais Paul ne sera pas accusé.

• 2008: Il est la cible de tirs au bar Ritz, où il a été convoqué, et fuit en fracassant la vitrine. Il se blesse accidentellement avec son arme une première fois.

• 2009: Son nom est sorti dans l'enquête sur une fusillade survenue près d'un café italien, le D-Lounge. Ce dernier et un autre bar, le Ferrari, seront fermés d'urgence par la Régie des alcools en 2010.