La Cour suprême du Canada a ordonné jeudi à la Cour d'appel du Québec de réentendre la cause de deux syndicats d'employés de Radio-Canada qui avaient contesté une loi fédérale sur le contrôle des dépenses ayant eu pour effet de réduire les augmentations salariales qui avaient été conclues avec l'employeur.

La section québécoise du Syndicat canadien de la fonction publique, affilié à la FTQ, parle d'une importante victoire.

Cette loi sur le contrôle des dépenses avait été adoptée par le gouvernement Harper en 2009 et visait à limiter à 1,5 pour cent les augmentations salariales des employés du secteur public pour les années 2008 à 2010.

L'Association des réalisateurs de Radio-Canada et la section locale 675 du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP-Québec) s'étaient alors adressées au tribunal pour contester la réduction du salaire de leurs membres en vertu de cette loi fédérale.

Les deux syndicats avaient en effet déjà négocié et conclu leurs conventions collectives avec la direction de Radio-Canada en octobre 2007, donc bien avant l'adoption de la loi. Or, les contrats de travail prévoyaient des augmentations de salaire plus généreuses que ce qu'imposait la loi.

Ces deux syndicats représentant près de 1000 employés avaient donc contesté la loi devant les tribunaux.

Au départ, la Cour supérieure du Québec avait statué que la loi fédérale sur le contrôle des dépenses contrevenait à la Charte des droits, plus particulièrement à la liberté d'association, donc au droit de négocier collectivement ses conditions de travail.

Mais la Cour d'appel du Québec avait ensuite infirmé ce jugement.

Dans sa décision rendue publique jeudi, par voie de communiqué seulement, la Cour suprême du Canada renvoie la cause à la Cour d'appel, en lui précisant qu'elle doit «statuer en conformité avec» deux jugements que la Cour suprême a rendus plus tôt ce mois-ci. Ces deux arrêts portent justement sur le droit des employés de négocier collectivement leurs conditions de travail face au gouvernement du Canada. Ces dossiers traitaient des conditions de travail à la Gendarmerie royale du Canada et à l'«Association de la police montée de l'Ontario».

Au cours d'une entrevue vendredi, l'avocate du SCFP, Me Annick Desjardins, s'est réjouie de la décision de la Cour suprême. «Avec ces directives-là, la Cour d'appel doit revoir sa décision. Pour nous, c'est tout à fait favorable. Elle a donné les grands principes à appliquer; elle demande à la Cour d'appel de revoir sa décision avec ces grands principes-là. Ça signifie qu'elle n'est pas d'accord avec la décision de la Cour d'appel, sinon elle aurait rejeté notre demande d'autorisation», a expliqué Me Desjardins.

L'avocate se montre optimiste pour l'issue du renvoi de la cause devant la Cour d'appel du Québec. «Si on regarde les critères qui sont retenus dans la cause «Police montée» (sur laquelle la Cour suprême a statué plus tôt ce mois-ci) et qu'on les applique à notre cas, on a de bien bonnes chances d'avoir un jugement favorable à la Cour d'appel», a opiné Me Desjardins.

Si les syndicats obtenaient éventuellement gain de cause en Cour d'appel, cela pourrait supposer le versement rétroactif des augmentations de salaire qui auraient dû être versées à compter de 2009 en vertu des contrats de travail qui avaient été conclus, soutient Me Desjardins. «C'est notre prétention. Et c'est ce que la Cour supérieure avait retenu lorsqu'elle nous avait donné raison» au départ, a ajouté l'avocate du SCFP.

La cause devrait être entendue par la Cour d'appel en 2016, selon son évaluation.