Jusqu'à la toute dernière seconde avant que le sans-abri Alain Magloire ne tombe sous les balles, le 3 février 2014, l'agent Pascal Joly a tenté de le maîtriser avec des armes intermédiaires, sans jamais dégainer son arme à feu. Il a failli en payer le prix, a-t-il raconté hier, à l'occasion de la troisième journée de l'enquête publique du coroner Luc Malouin.

Avec son coéquipier de longue date Mathieu Brassard, l'agent Joly a été le premier policier arrivé en renfort dans la rue Berri afin de prêter main-forte aux agents Jeanne Bruneau et Alex Campeau, qui étaient aux trousses de M. Magloire, armes au poing. L'agent Joly a immédiatement tenté de l'asperger de poivre de Cayenne. « Ça n'a pas fonctionné. Il s'est alors avancé vers moi en brandissant son marteau. J'ai reculé et tenté un deuxième jet, toujours inefficace. » L'agent Joly a ensuite déployé son bâton télescopique, mais s'est ravisé. « Je voulais faire une frappe de diversion, mais c'était trop dangereux. Il était très agressif, il ne coopérait pas. »

Quand il a vu la voiture de police qui fonçait sur Alain Magloire, l'agent Joly a profité de cette diversion pour s'approcher du suspect afin de le neutraliser. À son souvenir, le sans-abri a été heurté par l'auto-patrouille. Il l'a approché pour l'agripper. « Après, c'est un black-out. » Magloire a brandi son marteau vers Joly. Au même moment, l'agent Brassard faisait feu. « Je sais que ma vie est danger. Mon réflexe est de me protéger. » Joly s'est jeté par terre, il a fait dos au marteau et protéger sa tête à l'aide de ses mains. Après les événements, il a été en arrêt de travail pendant cinq mois.

Un col bleu intervient

Col bleu à la Ville de Montréal, Guy Miqueu a aussi été entendu hier au Centre de services judiciaires Gouin. Il colmatait une conduite d'eau à l'intersection des rues Ontario et Berri lorsque des cris ont attiré son attention. « J'ai vu une policière. Elle criait à un homme de lâcher son marteau, elle braquait son arme vers lui », a-t-il raconté.

L'agente Jeanne Bruneau s'adressait à Alain Magloire. « Je l'entends dire plusieurs fois de lâcher son marteau en pointant son arme sur lui.» M. Magloire tenait son marteau le long de sa jambe et ne répondait pas à la policière. Il déambulait calmement, selon le col bleu.

« Il avait l'air d'un gars normal. »

M. Miqueu s'est dirigé vers le sans-abri et lui a adressé la parole. « Pourquoi tu ne jettes pas ton marteau ? Ils vont te tirer. » M. Magloire a levé les bras en l'air, comme pour signifier son indifférence, avant de répondre sur un ton calme : « Je m'en fous, qu'ils tirent. »

Un peu plus tard, alors que quatre policiers tenaient en joue Alain Magloire face au terminus Berri, Guy Miqueu a vu une voiture de police « rentrer dedans ». « M. Malgoire a sauté, comme s'il avait voulu l'éviter, il a revolé et est tombé sur le capot. Ensuite, il m'a semblé qu'il donnait un coup à quelqu'un. »

Est-ce qu'Alain Magloire a été happé par la voiture que conduisait l'agent Denis Côté ou a-t-il délibérément grimpé sur le capot ? La voiture roulait-elle à basse ou à haute vitesse ? Les perceptions sont diverses. Cependant, selon le rapport d'autopsie, aucune marque de blessure interne ou externe n'a été observée sur les jambes de la victime. S'il y a eu impact, celui-ci a été léger, a précisé le coroner Malouin.

Le témoignage de l'agent Mathieu Brassard sera entendu aujourd'hui.