Le module des crimes haineux du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) est aux trousses de celui ou ceux qui se cachent derrière une plateforme d'extrême gauche où des anarchistes de tout le Québec se vantent de leurs exploits à coups de bombes incendiaires ou à coups de bouteille au visage.

Ils espèrent pouvoir ainsi remonter aux auteurs d'au moins une de ces attaques.

La Presse a appris que les policiers montréalais avaient obtenu la permission de la justice pour exiger que Facebook lui transmette des données de connexion relatives au site mtlcounter-info.org.

La plateforme, qui contient des dizaines de communiqués de revendications, inquiète le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence, a révélé La Presse en novembre dernier. On y enseigne comment fabriquer des cocktails Molotov ou saboter des oléoducs au moyen d'une perceuse.

Surtout, des militants d'extrême gauche y revendiquent des attaques multiples commises dans les derniers mois : l'incendie de plus d'un million de dollars de matériel industriel en une nuit, des blessures graves infligées à coups de bouteille ou le sabotage de machinerie industrielle, par exemple.

Le site lui-même est hébergé à l'étranger, en France, par une entreprise connue pour ses affinités politiques de gauche, ce qui peut expliquer que la police se tourne vers Facebook.

Le SPVM a demandé l'ensemble des données de connexion (adresses IP) depuis la création du profil Facebook associé au site afin de maximiser ses chances d'identifier le ou les internautes qui le gèrent.

ENQUÊTE SUR UNE AGRESSION ARMÉE

La demande du SPVM à Facebook a été formulée dans le cadre d'une enquête sur une agression armée : dans la nuit du 26 au 27 août dernier, un groupe d'individus - dont au moins certains membres portaient des t-shirts d'un groupe d'extrême droite - a été pris pour cible près d'un bar du Plateau Mont-Royal par des militants anarchistes.

« Les deux victimes se font alors frapper par plusieurs suspects armés de bâtons télescopiques et de bouteilles de bière », décrit l'avis de recherche diffusé alors par le SPVM. Les policiers recherchent deux assaillants armés de bâtons télescopiques et un troisième armé d'une bouteille de bière.

Or, une dizaine de jours après cette attaque, un communiqué décrivant les événements du point de vue des agresseurs apparaît sur le site mtlcounter-info.org, ainsi que sur le fil Facebook de la plateforme.

L'auteur y explique que des « militants antifascistes » sont arrivés « en grand nombre » afin de s'en prendre aux deux individus. « Après cinq secondes, une bouteille de bière était déjà cassée sur la tête de l'un d'entre eux. »

Le texte conclut fièrement : « Disons qu'ils étaient tous en sang et pas mal amochés, trois d'entre eux ont été hospitalisés gravement. »

Remonter jusqu'à l'auteur du message - par le truchement du site qui héberge celui-ci - pourrait permettre à la police d'avancer dans son enquête criminelle.

HAUSSE DE LA TENSION

Selon nos informations, la police de Montréal constate actuellement une hausse de la tension entre groupes d'extrême gauche et d'extrême droite. Les autorités s'attendent à d'autres accrochages entre militants à court ou moyen terme. Ils craignent aussi que des tiers qui n'ont rien à voir avec ces tensions ne puissent être pris pour cible par erreur.

La semaine dernière, le groupe néofasciste de Québec Atalante a fait les manchettes en affichant un peu partout au centre-ville de Montréal des banderoles sur lesquelles des personnages publics étaient traités de « traîtres » ou de « parasites », selon que ceux-ci étaient blancs ou pas.

Toujours la semaine dernière, des résidants du Village, le quartier gai de Montréal, ont pu remarquer des affiches dénonçant « des nazis [qui] tentent de patrouiller le quartier ». La dénonciation vise un groupe baptisé les Soldats d'Odin.

PHOTO TIRÉE DE L’INTERNET

Cette photo tirée de l'internet montrerait les dommages subis par les structures pétrolières de l'entreprise Squatex dans le Bas-Saint-Laurent lors d'un incendie qui aurait été allumé par des membres du groupe Forces Écosocialistes, en juillet dernier.