Tel qu'annoncé par La Presse, le secret qui entoure une technologie policière de décryptage des messages protégés sur les appareils BlackBerry a entraîné lundi matin l'abandon des procédures judiciaires contre les 11 derniers accusés du projet Clemenza, une importante enquête de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) menée contre la relève de la mafia montréalaise en 2010 et 2011.

«Considérant les demandes complexes de divulgation faites par les procureurs de la défense et après un long travail des policiers et procureurs de la poursuite pour y répondre, nous sommes arrivés à la conclusion que nous ne pouvions pas rencontrer nos obligations constitutionnelles en matière de divulgation de la preuve», a expliqué à La Presse Me Marie Michèle Meloche, du Service des poursuites pénales du Canada, peu après l'audience.

La défense avait poussé la poursuite dans ses derniers retranchements. Elle réclamait depuis presque un an d'obtenir la preuve sur la technologie avec laquelle les policiers avaient identifié les téléphones Blackberry utilisés par certains accusés et intercepté leurs messages textes cryptés. La divulgation de cette technologie serait très sensible; elle aurait été mise au point aux États-Unis et serait utilisée dans la lutte contre le terrorisme.

Comme la poursuite s'est révélée incapable de transmettre les détails de la preuve demandée aux accusés, la cour a décrété un arrêt des procédures ce matin au palais de justice de Montréal pour les 11 derniers accusés. En mars, la poursuite avait abandonné les accusations de gangstérisme, trafic et importation de stupéfiants, possession d'armes et enlèvement contre 36 autres individus arrêtés dans le cadre de la même enquête.

L'enquête Clemenza a été lancée en 2010 contre les clans de la mafia montréalaise qui commençaient à prendre de l'ampleur en raison de l'affaiblissement du clan des Siciliens, étrillé lors de l'opération Colisée effectuée en novembre 2006. Une soixantaine d'individus ont été arrêtés durant les trois phases de l'enquête Clemenza. Une dizaine ont plaidé coupable et ont reçu une peine. Les enquêteurs avaient saisi plus de 300 kg de cocaïne, 2 millions de dollars et plusieurs armes durant cette enquête majeure.

-Avec la collaboration de Daniel Renaud, La Presse