Le chroniqueur Patrick Lagacé ne s'en doutait pas, mais il était épié, espionné par la police de Montréal, avec la bénédiction de la justice, de l'hiver à l'été dernier. Ses registres téléphoniques ont été passés au crible. Ses interlocuteurs, identifiés. On a autorisé la possibilité d'activer à distance le GPS de son téléphone pour le localiser. Le SPVM n'avait jamais avoué être allé aussi loin - beaucoup trop loin, disent plusieurs - dans sa chasse aux sources journalistiques. Voici le fil des événements.

Fin 2015

La section des Enquêtes spéciales du SPVM ouvre une investigation concernant le policier Faycal Djelidi, un spécialiste des gangs de rue, sur la base d'allégations de fabrication de preuve.

Entre-temps

En surveillant les numéros entrants et sortants du cellulaire de Djelidi, le SPVM découvre que le policier et Patrick Lagacé entrent parfois en contact. Selon la police, des informations auxquelles Djelidi a accès sont concurremment publiées par d'autres journalistes et d'autres médias - jamais par M. Lagacé. Les enquêteurs décident d'ouvrir un nouveau pan d'enquête criminelle concernant cette situation.

13 janvier 2016

Les Enquêtes spéciales obtiennent un premier mandat de surveillance applicable au cellulaire de Patrick Lagacé, autorisé par la juge de paix Josée de Carufel. Elle en délivrera six autres la semaine suivante. L'un d'entre eux vise à obtenir les registres téléphoniques des mois précédant janvier.

Mars 2016

Le SPVM obtient un renouvellement de ses mandats.

3 mai 2016

La juge de paix de Carufel autorise un mandat de localisation sur un cellulaire de Patrick Lagacé, qui permet au SPVM de connaître sa position grâce à la puce GPS qui y est intégrée. Pendant ce même mois, elle autorisera le renouvellement de six autres mandats de surveillance concernant le cellulaire du journaliste.

7 juillet 2016

Le chef Philippe Pichet sort de ses vacances pour annoncer l'arrestation de quatre policiers (un cinquième s'ajoutera rapidement), dont Faycal Djelidi. Ce dernier fait face à une kyrielle d'accusations en lien avec ses visites présumées à des prostituées et à de la fabrication de preuve. Aucune n'est liée aux fuites d'information dont le SPVM le soupçonnait. En conférence de presse, le chef Pichet allègue qu'un ou plusieurs des policiers arrêtés avaient tenté d'entrer en contact avec les médias.

27 octobre 2016

Dans le cadre de procédures judiciaires de routine afin d'obtenir de l'information sur l'enquête, La Presse et Patrick Lagacé apprennent l'existence de 24 mandats de surveillance autorisés contre le cellulaire du journaliste.