Le prédateur sexuel Kamal Meddane est le plus jeune criminel au Québec à avoir été déclaré délinquant dangereux. Il vient de perdre sa bataille visant à se faire retirer cette lourde étiquette devant le plus haut tribunal de la province.

À 15 ans, le Montréalais touche les parties intimes d'une camarade de classe non sans la menacer et l'intimider. Vu son jeune âge, la poursuite se contente de lui faire signer un engagement de ne pas troubler l'ordre public.

À 16 ans, il viole une jeune fille, cette fois avec beaucoup de violence. Cela lui vaut un placement de huit mois. Il refuse une première thérapie. À 17 ans, alors qu'il est en mise à l'épreuve, il fait trois nouvelles victimes, des adolescentes choisies au hasard dans un autobus ou une station de métro. À 18 ans, il fait une nouvelle victime avant d'être arrêté de nouveau.

À 20 ans, après avoir été trouvé coupable de cette série d'agressions devant la chambre de la jeunesse de la Cour du Québec, il est condamné à une peine pour adultes. C'est pourquoi les médias peuvent l'identifier.

En 2009, après avoir entendu deux psychiatres conclure à une déviance sexuelle chez l'accusé, le juge Patrice Hurtubise déclare Meddane délinquant dangereux.

Par la suite, en chambre criminelle de la Cour du Québec, le juge Serge Boisvert déclare à nouveau Meddane délinquant dangereux après que ce dernier eut reconnu sa culpabilité à une autre accusation d'agression sexuelle, cette fois-ci commise alors qu'il était majeur.

Meddane se tourne alors vers la Cour d'appel pour contester ces peines ainsi que certaines déclarations de culpabilité. Trois juges de la Cour d'appel viennent de rejeter l'ensemble de ses arguments dans une décision rendue le 17 février.

Situation inédite

«Je suis conscient du caractère exceptionnel de la situation: il n'est pas fréquent - et cela doit le demeurer - que l'on prononce une déclaration de délinquant dangereux à l'endroit d'un jeune adulte dont la criminalité s'est produite alors qu'il était mineur ou à peine majeur et qui n'a jamais connu dans le passé une peine d'emprisonnement», écrit le juge de la Cour d'appel Guy Gagnon.

L'expert de la défense, le psychiatre Serge Gauthier, a conclu que Meddane souffrait de paraphilie, mais sous l'influence de l'alcool. Il a aussi diagnostiqué un trouble de déficit d'attention. Ce déficit d'attention doit être traité en priorité puisqu'il expliquerait ses échecs aux thérapies proposées, selon le Dr Gauthier.

De son côté, l'expert de la Couronne, le psychiatre Louis Morissette, a décrit un «prédateur sexuel aux traits narcissiques, antisociaux et souffrant de sadisme envers les femmes». L'accusé ne se reconnaît aucune difficulté et refuse tout traitement, selon le Dr Morissette qui ne lui a pas trouvé de problème d'alcool.

Les deux experts s'entendaient sur le fait que Meddane présentait un «haut risque de récidive». Dans leur décision, les trois juges de la Cour d'appel soulignent la lenteur du cheminement du dossier d'appel. «Si l'appelant a, depuis 2009, amorcé une réhabilitation ou se comporte maintenant d'une manière qui fait mentir les pronostics à son sujet, la Cour n'en a pas été informée», conclut le juge Gagnon.

En vertu de cette peine d'exception, Meddane sera donc incarcéré pour une durée indéterminée. Le jeune homme purgera au moins sept ans de prison, puis fera l'objet d'une évaluation tous les deux ans.

Cas d'espèce, mais pas unique

Après avoir examiné la jurisprudence, la Cour d'appel du Québec a conclu que le cas de Kamal Meddane doit être vu «comme un cas d'espèce, mais pas pour autant unique». La Cour d'appel du Nouveau-Brunswick s'est prononcée en ce sens pour un délinquant âgé de 21 ans; de même que la Cour supérieure de l'Ontario concernant un délinquant de 20 ans ayant un profil semblable à celui de Kamal Meddane, écrit le juge Guy Gagnon dans sa décision du 17 février dernier.