Le juge Serge Champoux a imposé une peine à un accusé dont il ne savait «rien», le 3 janvier dernier. Le juge de la Cour du Québec à Granby n'a pas apprécié que les avocats des deux parties lui recommandent d'imposer une peine de trois mois de prison à Tchefli Fadel, 24 ans, un fraudeur en matière de clonage de cartes bancaires, sans l'éclairer sur le personnage.

D'autant plus qu'on lui avait suggéré une peine clémente pour un complice, supposément moins impliqué que M. Fadel. «Deux jours plus tard, le 11 décembre 2013, l'accusé Fadel est amené, plaide coupable à son tour et les deux procureurs m'expliquent que la petitesse de la peine suggérée, la même que celle du complice, trouve sa justification dans le fait que Tchefli Fadel n'avait qu'un rôle mineur dans la tentative de fraude.» «Je trouve cette situation déplorable, poursuit le juge dans le jugement. [...] ces événements sont de ceux qui tendent à jeter le discrédit sur l'administration de la justice.»

Dans cette affaire, M. Fadel a plaidé coupable à une accusation d'avoir possédé un appareil qui permet de copier les données des cartes bancaires dans les guichets automatiques. Le crime s'est produit dans une succursale bancaire de Granby, en mai 2010.

Le juge estime que les procureurs se sont contentés de «brèves généralités» pour appuyer leur suggestion de peine, le privant ainsi de nombreuses informations. «Par exemple, je ne connais rien de l'accusé: qui est-il, que fait-il dans la vie, quelle est son éducation, quel est son mode de vie? Je n'ai aucune explication pour comprendre le passage à l'acte.»

La Presse a tenté sans succès d'obtenir le point de vue de la procureure de la Couronne Véronic Champagne, et de l'avocate de la défense Mireille Leblanc.

Un coup d'oeil sur le parcours judiciaire de M. Fadel démontre qu'il s'est retrouvé devant la justice dès l'âge de 18 ans pour crimes reliés aux cartes de crédit. Le 11 octobre 2011, M. Fadel a réuni plusieurs dossiers de fraude et non-respect des conditions, a plaidé coupable en Cour du Québec et a écopé de neuf mois de prison pour l'ensemble.

Actuellement, M. Fadel a des dossiers pendants en Cour du Québec et en cour municipale, mais pas en matière de fraude. M. Fadel s'est fait arrêter pour fraude en Ontario, également. En 2008, il s'était fait prendre à voler la manette qui enregistre les paiements par cartes, dans un magasin, et avait été détenu cinq mois.