Plongée dans un tourbillon d'enquêtes avec filature, écoute électronique, perquisitions et arrestations à la clé, l'Unité permanente anticorruption (UPAC) a pris un temps d'arrêt hier pour serrer les rangs et réfléchir à son avenir.

Comme a pu le constater La Presse, les 225 employés de l'UPAC ont été conviés hier matin à un «exercice stratégique» dans un hôtel de Longueuil. Studieux, les enquêteurs, analystes et autres dirigeants, incluant le personnel affecté au registre des entreprises admissibles, ont notamment confronté leurs points de vue lors de cette formation encadrée par l'École nationale d'administration publique (ENAP)

«C'est important de faire, tout le monde ensemble, une planification stratégique sur le moyen et le long terme, sur ce que va être l'UPAC dans quatre-cinq ans à partir des débats qu'on fait aujourd'hui», a expliqué le commissaire Robert Lafrenière surpris par la présence de La Presse.

Si l'UPAC a connu des débuts difficiles marqués par un manque de cohésion entre les différentes unités, tout cela est derrière, laisse entendre M. Lafrenière. D'ailleurs, il souligne que la rencontre d'hier visait à «serrer les rangs» et à «partager les processus et les meilleures façons de faire».

Avec un large sourire, il soutient que lorsqu'il fera état publiquement des activités de l'UPAC, en décembre prochain, ce sera «un très bon bilan» qu'il présentera. Même pour l'équipe de vérificateurs, qui doit s'assurer de la probité des entreprises qui veulent brasser des affaires dans le secteur public, affirme-t-il. «Ça va rondement» après une période de mise en place et d'ajustement, dit-il.

Perquisition discrète

Robert Lafrenière se montre moins volubile sur la perquisition réalisée dans les bureaux du Parti libéral du Québec (PLQ), en juillet dernier, que Radio-Canada a révélée lundi. Il rejette l'idée que la discrétion du geste puisse avoir été motivée par la politique.

«On peut faire une centaine de perquisitions dans une année et très peu sont médiatisées. Et quand elles le sont, c'est qu'il y a eu une fuite. [...] C'est très fréquent qu'on fasse une perquisition discrètement, sans auto-patrouille», a souligné M. Lafrenière.

En comparaison, l'UPAC avait déployé 75 policiers à l'hôtel de ville de Montréal, l'hiver dernier, pour une perquisition. L'opération n'était pas passée inaperçue. M. Lafrenière estime que ce grand déploiement d'effectifs était «nécessaire», alors que pour la perquisition au PLQ, «ce n'était pas dans la stratégie». «Ça ne nous apportait rien de plus à ce moment-là. Pour nous, il s'agissait de faire une perquisition avec un mandat en bonne et due forme. Point à la ligne», a-t-il affirmé.

Il n'a pas été question d'aborder le contenu de l'enquête et d'apporter des nuances sur la cible exacte, c'est-à-dire le PLQ ou le financement politique illégal chez les libéraux et dans les autres partis. Il s'est borné à dire que le travail se poursuit.

Quand on lui fait remarquer que dans plusieurs dossiers (les arrestations à Laval, par exemple, dans le cadre de l'opération Honorer), l'UPAC agit en amont de la commission Charbonneau, Robert Lafrenière a un petit rire. «La collaboration est excellente avec la Commission», souligne-t-il sans aller plus loin.

La chasse gardée de la corruption

Pour ce qui est du soutien entre l'UPAC et l'Escouade de protection de l'intégrité municipale (EPIM) mise en place en janvier dernier par le Service de police de la Ville de Montréal, M. Lafrenière explique brièvement que la corruption est un terrain appartenant à son équipe. «C'est important que ce soit à une seule place. Les organisations criminelles qui pourraient être à Montréal peuvent être aussi ailleurs. Il est donc important d'avoir une stratégie qui soit globale et provinciale», dit-il.

M. Lafrenière ajoute qu'il y a échange d'information avec l'EPIM. «Mais on travaille à des niveaux différents. L'EPIM travaille surtout sur la probité des fonctionnaires municipaux alors que nous, c'est de l'enquête criminelle», précise-t-il avant d'aller rejoindre ses troupes en réflexion.