Pour la seconde fois en autant de jours, fait plutôt inusité, l'Unité permanente anticorruption (UPAC) a frappé contre le maire de Laval. Une perquisition a commencé en début de soirée vendredi dans un luxueux immeuble du chemin des Cageux, à Laval, où Gilles Vaillancourt résiderait aussi.

L'appartement visé par les policiers, un penthouse avec ascenseur privatif, serait situé aux 14e et 15e étages de cet immeuble bâti par E. Khoury Construction au bord de l'eau, face à l'ile Paton, non loin de la résidence perquisitionnée la veille. Sa valeur est estimée à 950 000$.

Vers 19h30, au moins cinq enquêteurs se sont présentés discrètement sur les lieux. Une voiture de patrouille de la Sûreté du Québec s'est garée devant l'entrée. Selon une source, les enquêteurs s'intéresseraient à la fois à un local de rangement de l'immeuble et à l'appartement.

La porte-parole de l'UPAC, Anne-Frédérick Laurence, a confirmé à La Presse vendredi soir que «des perquisitions» étaient en cours, sans donner plus de détail.

Un cadeau?

Une voisine a dit avoir vu le maire Vaillancourt sur le chemin des Cageux récemment. «On avait entendu dire qu'il habitait là, a dit la femme, qui a refusé de donner son nom. Il était temps que la police fouille, il y a anguille sous roche.» Elle a dit connaître une personne dans l'immeuble, où, selon elle, plusieurs personnes liées au domaine de la construction auraient emménagé depuis sa construction en 2010.

Fait plutôt intrigant, selon les dires de nos sources, Gilles Vaillancourt a obtenu l'appartement en version dépouillée ou «base building», c'est-à-dire brut de béton, sans aménagement intérieur. Les enquêteurs étudient l'option que ce soit un cadeau en retour d'un dézonage.

Le nom de Gilles Vaillancourt n'apparaît pas dans le rôle foncier de sa municipalité.

La nouvelle perquisition intervient quelques heures après que le maire eut signifié son refus de démissionner, et qualifié de «rumeurs» ce qu'il entendait dans les médias depuis l'opération de jeudi soir.

La perquisition de jeudi ciblait trois services de l'hôtel de ville, dont les serveurs informatiques et le service du génie, ainsi que la résidence «officielle» de Gilles Vaillancourt rue Croissant des Îles qui est d'ailleurs à vendre pour 1,1 million.

Appartement en Floride

Par ailleurs, Francine Dupuis Vaillancourt, femme du maire, a acquis en 2006 un appartement de 1283 pi2 dans un immeuble de luxe en bord de mer à Miami, dont la valeur fiscale était de 303 320$ en 2009. Un des intervenants dans cette transaction, selon nos recherches dans les documents légaux, était une société établie à Nassau, aux Bahamas. Cet immeuble ainsi que deux autres des environs abritaient à la même époque plusieurs acteurs majeurs de la construction et du génie-conseil lavallois.

L'enquête, qui se poursuit toujours, porterait sur plusieurs allégations incluant la corruption, ainsi que de possibles transferts de fonds vers des paradis fiscaux.

La Presse s'était déjà rendue jeudi soir dans l'immeuble du chemin des Cageux, au moment des autres perquisitions. Hier soir, personne ne semblait présent dans l'appartement ciblé. Plusieurs habitants de la tour de 15 étages paraissaient étonnés d'apprendre que le maire y avait un domicile. «Je ne savais pas, je ne l'ai jamais vu, a dit Patrick Giroux, qui a emménagé sur le chemin des Cageux il y a deux mois. Je ne le connais pas personnellement, mais ce que je sais, c'est qu'il a beaucoup contribué au développement de Laval. Mais il y a peut-être des choses dont nous n'avons pas connaissance.»

On ignore si le maire Vaillancourt se trouvait sur les lieux les deux soirs.