Même s'il est impossible de savoir combien de plantations poussent incognito dans nos champs ou d'évaluer l'impact réel de la répression, les policiers soutiennent que leurs efforts en valent la peine.

La Sûreté du Québec (SQ) a déployé ses effectifs partout au Québec dans le cadre de son programme Cisaille, en vigueur depuis 1999. «On en parle de plus en plus, et notre présence est connue autant chez les producteurs que chez les agriculteurs», affirme la sergente Ingrid Asselin, porte-parole de la SQ en Montérégie.

Le corps policier provincial éradique des centaines de milliers de plants de cannabis chaque année, procède à de nombreuses arrestations, en plus de faire des repérages par hélicoptère à l'aide de photographies aériennes. Des appareils des Forces canadiennes et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) sont aussi mis à contribution.

D'importantes saisies ont déjà fait les manchettes, notamment celles en marge d'une journée régionale d'éradication, menée presque simultanément en septembre dans tous les territoires desservis par la SQ.

Environ 25 000 plants ont été arrachés ce jour-là seulement dans les régions de la Mauricie, du Centre-du-Québec et de la Montérégie, terreaux fertiles des mariculteurs. «Chez nous, plus de 70 sites ont été perquisitionnés dans 11 MRC», résume la sergente Asselin.

Un bilan provincial est attendu en octobre.

Mais une recherche publiée en 2008 par le criminaliste Martin Bouchard, de l'Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique, démontre que le cannabis saisi au Québec ne constituerait que 10% de celui qui est cultivé.

«Ces statistiques sont difficiles à prouver. Je suis d'accord qu'on touche un minimum, mais c'est presque infaisable de ratisser la province au complet pour trouver des plantations», affirme le caporal Luc Chicoine, coordonnateur national de la Section des drogues à la GRC.

Le corps fédéral pilote depuis des années un projet d'éradication nommé Sabot, semblable à Cisaille. «On éradiquera jamais tout le pot, mais si toutes ces opérations coûtent moins cher que la valeur des plants saisis sur le marché noir, c'est un succès», note le caporal Chicoine.

Même son de cloche de la part du sergent à la retraite Richard Dupras, ancien responsable des enquêtes - notamment de l'opération Cisaille pour la MRC d'Arthabaska, dans le Centre-du-Québec. «La police tente de contrôler un phénomène, pas de l'éradiquer. Ça prendrait des ressources et des ressources», lance M. Dupras, qui n'a pas été surpris d'apprendre que nous avons facilement identifié des plantations en survolant sa région.

Sous ses ordres, les policiers avaient éradiqué 35 000 plants en une seule année dans sa MRC. «Il y a de très grandes cultures dans la région. C'est très facile d'y entrer, couper une centaine de plants de maïs et d'y mettre de la marijuana», admet le sergent à la retraite.