La veille de l'arrestation de Tony Accurso, Montréal a suspendu l'octroi de 14 contrats d'une valeur de 29 millions à sa firme Louisbourg SBC, le temps de «procéder à des vérifications».

C'est du moins ainsi que le responsable du développement économique au comité exécutif, Richard Deschamps, a expliqué cette information, lancée en milieu de journée par le parti de l'opposition officielle Vision Montréal. «On n'était pas à l'aise avec ça, on est conscient de la situation, a-t-il avoué. On va vérifier les administrateurs, faire le point sur la loi 35. Nous avons décidé de prendre un certain recul, un temps d'arrêt.»

Il a rappelé qu'en juin dernier, le maire Gérald Tremblay s'était plaint au ministre des Affaires municipales Laurent Lessard des faiblesses de la loi 35, qui n'a pas réussi à réduire la grande concentration des contrats dans le marché montréalais.  L'octroi de ces 14 contrats a été reporté à la prochaine réunion du comité exécutif, le 15 août prochain.

Poursuites coûteuses

M. Deschamps avait initialement convoqué les médias pour justifier le fait que son administration soit obligée, dans le cadre légal actuel, d'octroyer les contrats au plus bas soumissionnaire conforme. Malgré la condamnation de Tony Accurso pour fraude, la Ville de Montréal octroie plusieurs dizaines de millions en contrats à ses firmes affiliées, surtout Louisbourg SBC.

«La Ville applique rigoureusement la loi 35 telle qu'elle est libellée, a justifié M. Deschamps. Toutes les entreprises qui ont une licence restreinte de la Régie du bâtiment du Québec ou qui figurent sur sa liste n'ont pas de contrat avec la Ville. On ne peut pas appliquer la loi 35 de façon préventive.»

Exclure certaines firmes ferait en sorte que la Ville «s'exposerait à des poursuites, qui seraient en bout de ligne à la charge du contribuable».

Le report des 14 contrats accordés à une firme de Tony Accurso quelques heures avant son arrestation est «une drôle de coïncidence», a commenté la mairesse de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles Chantal Rouleau, élue sous la bannière de Vision Montréal. Si elle reconnaît que l'administration municipale montréalaise ne dispose pas des «outils adéquats» pour contrer la collusion, elle assure que son propre parti aurait été beaucoup plus actif. «Nous, on aurait mis un terme à ça. On ne peut plus continuer comme ça. Être poursuivi par une personne qui est menottée, qui a déjà été reconnue coupable de fraude et qui a été arrêtée pour une deuxième fois? Oui.»