Guy Turcotte n'est pas prêt à recouvrer une liberté complète, mais sa réclusion complète, quant à elle, est terminée.

> La décision de la Commission d'examen des troubles mentaux (PDF)

Sorties autorisées pour Guy Turcotte: qu'en pensez-vous?

L'homme de 40 ans, actuellement incarcéré à l'Institut Philippe-Pinel, a été déclaré criminellement non responsable des meurtres de ses deux enfants au terme de son procès, le 5 juillet dernier. Turcotte pourra bientôt bénéficier de sorties encadrées, a tranché la Commission des troubles mentaux, hier.

Ainsi, pour les trois prochains mois, M. Turcotte pourra sortir, jusqu'à un maximum de huit heures par jour, à condition qu'il soit accompagné d'un membre de sa famille ou du personnel de l'Institut. Pour les deux mois suivants, il pourra sortir seul, jusqu'à un maximum de huit heures par jour, si son plan de soins le permet. Pour le sixième mois, il pourra s'absenter seul jusqu'à un maximum de 16 heures par jour et aussi coucher chez un membre de sa famille, à condition que celui-ci soit présent. La Commission ordonne que le cas de M. Turcotte soit réévalué en décembre, et signale qu'en tout temps, le responsable de l'Institut Philippe-Pinel peut restreindre ou suspendre les sorties, si l'état mental de M. Turcotte se détériore. Il est par ailleurs interdit à M. Turcotte de communiquer avec son ex-conjointe, Isabelle Gaston, et le nouveau conjoint de cette dernière.

Irréaliste

«L'accusé et ses experts affirment qu'il a un projet de sortie réaliste. Il paraît, au contraire, tout à fait irréaliste de songer à un retour en société sans transition», peut-on lire dans la décision de la Commission. Du même souffle, celle-ci signale qu'elle n'est pas non plus d'accord avec les recommandations des experts de l'Institut Philippe-Pinel de détenir M. Turcotte sans possibilité de sorties autrement qu'avec un membre du personnel. La Commission, exceptionnellement composée de cinq personnes au lieu de trois, précise qu'elle devait rendre une décision qui privait le moins possible de liberté M. Turcotte, tout en tenant compte de la sécurité du public, qu'il faut protéger des personnes dangereuses. La Commission relève que M. Turcotte sera aux prises avec de grandes difficultés à l'extérieur, et qu'il n'a pas acquis les habiletés nécessaires pour y faire face. «L'accusé demeure très fragile», a estimé la Commission.

Verdict

Celui qui exerçait la profession de cardiologue à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme a poignardé ses enfants, Olivier, 5 ans, et Anne-Sophie, 3 ans, à une quarantaine de reprises, la nuit du 20 février 2009, dans la maison de Piedmont qu'il louait depuis sa séparation d'avec Isabelle Gaston. Lui-même a avalé du lave-glace pour se suicider, cette nuit-là. Le verdict rendu par un jury de 11 personnes, le 5 juillet dernier, a scandalisé beaucoup de gens, et la Couronne l'a finalement porté en appel. La cause est toujours pendante.

Selon les psychiatres, M. Turcotte souffrait d'un trouble d'adaptation avec humeur anxiodépressive, lors des événements. Depuis la fin du procès, il est incarcéré à l'Institut Philippe-Pinel. Il revient à un tribunal administratif de décider de son sort. La Commission avait trois possibilités: la détention, la liberté totale, ou la liberté avec conditions. La Commission a choisi une avenue un peu différente.

Lors de l'audience, Guy Turcotte avait indiqué qu'il ne représentait plus un danger pour personne, qu'il n'avait pas l'intention de communiquer avec son ex-conjointe, et qu'il voulait refaire sa vie. Il souhaitait redevenir médecin, et aimer à nouveau. Isabelle Gaston, de son côté, était très sceptique, et même inquiète devant ces propos. Elle ne croyait pas à sa sincérité.

Partie lundi

Il a été impossible d'obtenir la réaction d'Isabelle Gaston, qui est partie en voyage à l'étranger, lundi, pour quelques semaines et «sans cellulaire», a indiqué son frère, Patrick Gaston, hier. La décision a été rendue publique hier matin, mais les parties avaient été avisées la veille du résultat. Patrick Gaston s'est dit «bien déçu» de la décision. En fait, il trouve «complètement absurde» que M. Turcotte ait des «privilèges de sorties».

«Isabelle a peur, et moi aussi, j'ai peur pour moi. À mon humble avis, le système est défaillant. Ça prend 100% pour condamner, mais une particule pour sortir. Là, on devrait les sortir, les chaudrons et les casseroles, et protester», a dit M. Gaston.