Le feuilleton judiciaire qui oppose une mère d'origine philippine à la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB) a connu un ultime rebondissement cette semaine. Six ans après un incident dans la cafétéria d'une école primaire, la Cour d'appel infirme la condamnation d'une enseignante et d'un directeur d'école rendue par le Tribunal des droits de la personne.

Le Tribunal des droits de la personne avait-il compétence pour sanctionner des événements pourtant considérés comme non discriminatoires par la Commission des droits de la personne (CDP)? Selon le juge Pierre Dalphond, la réponse est non. Les dommages de 15 000$ accordés à la mère de cet enfant, réprimandé pour sa manière de manger, sont de plus «déraisonnables», écrit le juge dans sa décision rendue mardi.

Le feuilleton, dont les secousses ont été ressenties jusqu'aux Philippines, a démarré en avril 2006 lors d'un repas à la cantine d'une école de Roxboro. Le fils de la plaignante, Maria Gallardo, a alors 7 ans.

»Dans ton pays, est-ce qu'on se lave les mains?»

Il mange des spaghettis en utilisant à la fois une cuillère et une fourchette. L'éducatrice de l'école, Mme Bertrand, estime qu'il fait le clown et le réprimande. Mais sa mère soutient qu'il ne fait que manger à la manière des Philippins.

L'affaire pourrait en rester là, mais les choses s'enveniment. Mme Gallardo alerte M. Bergeron, le directeur de l'école, puis les médias locaux. Quelques jours plus tard, Mme Betrand réprimande une nouvelle fois l'enfant, qui ne s'est pas lavé les mains avant le repas. «Dans ton pays, est-ce qu'on se lave les mains?», lui demande-t-elle alors.

Mme Gallardo saisit le Centre de recherche-action sur les relations raciales, qui porte plainte à la CDP. Deux ans plus tard, celle-ci tranche: l'enfant n'a pas été victime de discrimination. Mme Gallardo porte alors elle-même l'affaire devant le Tribunal des droits de la personne, qui, deux ans plus tard, lui donne raison et condamne la CSMB, l'éducatrice et le directeur à lui verser 15 000$.

C'est cette décision que vient de casser la Cour d'appel, qui condamne Mme Betrand à ne verser que 2000$ à la mère de l'enfant.

La CSMB, qui accueillant favorablement cette décision, a limité ses commentaires à un communiqué de presse.

«La commission scolaire où se vit la plus grande diversité au Québec se réjouit du résultat qui fera désormais jurisprudence dans la province», peut-on lire.

La Presse a joint l'avocat de Mme Gallardo, Me René Saint-Léger. Au moment d'écrire ces lignes, il n'avait toujours pas rappelé.