Alors qu'il était professeur d'éducation physique et entraîneur de soccer au Collège français de Longueuil, Denis Morasse a invité des élèves de première secondaire à se baigner nus dans son spa à l'heure du dîner.

Sous le couvert de toutes sortes de «jeux», il en profitait pour leur faire des attouchements. Il les raccompagnait ensuite à l'école, non sans leur rédiger un billet pour expliquer leur retard.

Même si, au terme de son procès, il a été reconnu coupable d'avoir eu des contacts sexuels avec six victimes âgées de 11 à 13 ans, l'homme continue de prétendre que ce n'était qu'un jeu.

Il ne se perçoit pas comme un pédophile, a indiqué son avocat, Marco Labrie, lundi, au moment des plaidoiries sur la peine au palais de justice de Longueuil. La défense a plaidé en faveur de la peine minimale, 45 jours d'emprisonnement ferme. De son côté, la Couronne a réclamé 18 mois de prison assortis d'une probation de 3 ans.

«Je trouve cela aberrant. C'est difficile à entendre. Il essaie de minimiser ses gestes», a dit à La Presse la mère d'une des victimes à sa sortie de la salle d'audience.

Son fils a dû changer d'école parce que ses résultats scolaires ont chuté. Il a perdu le goût de jouer au soccer. «Après que le premier jeune eut porté plainte, les autres se sont dévoilés. Ça a été le choc total d'apprendre que notre fils était parmi eux», raconte cette mère.

Âgé de 12 ans au moment des faits, son fils en a aujourd'hui 16. Il ne veut plus du tout en entendre parler. «C'est difficile pour un enfant de porter plainte, d'aller en cour. On ne sait pas quelles séquelles tout ça va laisser», dit cette mère inquiète.

Denis Morasse enseignait dans cette école privée depuis 1989. Il a été congédié en décembre 2007. Cette année-là, du mois de mars au mois de novembre, il a emmené des élèves chez lui à l'heure du dîner, à l'insu des parents et de la direction de l'école.

Souvent nu dans le spa, l'accusé leur faisait des massages. Parfois, il mettait de la neige dans leur maillot avant de le leur arracher carrément, toujours «dans un contexte de jeu».

L'accusé a aussi embauché une autre victime, un garçon de 11 ans, pour qu'il l'aide à tracer des lignes sur les terrains de soccer. Ils prenaient ensuite leur douche ensemble. Il savonnait le corps de sa victime afin, disait-il, «d'enlever les résidus de peinture». Il s'est également livré à d'autres attouchements sur un enfant en le reconduisant en voiture après l'école.

«Ce sont des gestes odieux et inacceptables. Le message doit être clair. On ne peut se servir d'un emploi ou de son lien de confiance avec un jeune pour en arriver à commettre pareils gestes», a plaidé la procureure de la Couronne, Marie-Josée Guillemette.

Le risque de récidive est faible, a insisté pour sa part la défense, sur la foi du rapport de la sexologue qui l'a évalué. «Peut-être que ce monsieur-là ne sait même pas qu'il a un problème», n'a pu s'empêcher de dire le juge Pierre Bélisle en écoutant les arguments de Me Labrie. M. Morasse n'est pas entièrement fermé à l'idée d'entreprendre une «démarche exploratoire de thérapie», lui a répondu l'avocat de défense.

Au procès, les versions des victimes et de l'accusé concordaient la plupart du temps, mis à part le fait que Morasse a toujours nié qu'il recherchait une gratification sexuelle. À ses yeux, ce n'était que des «niaiseries» pour se rapprocher de ses joueurs. L'homme de 55 ans, en couple avec une femme et père de trois enfants, a été reconnu coupable sous sept chefs de contacts sexuels le 31 janvier dernier. Le juge Bélisle prononcera sa peine le 17 septembre.

4 EXTRAITS DU VERDICT DE CULPABILITÉ PRONONCÉ JUGE PIERRE BÉLISLE RENDU LE 31 JANVIER 2012

«Si son attitude participe du jeu anodin, pourquoi ne pas requérir l'autorisation des parents d'amener leur fils chez lui afin de se baigner nu dans le spa sur l'heure du midi tout en recevant un massage pour relaxer? Aux yeux d'une personne raisonnable, y a-t-il un seul parent qui aurait accepté une telle proposition? Bien sûr que non. Voilà pourquoi il ne leur a jamais demandé l'autorisation d'agir ainsi.»

«À l'égard de Y, les gestes sont révélateurs. Il s'est baigné avec lui au moins quatre fois dans le spa. Il lui a prodigué des massages au dos, aux pieds et aux épaules tout en étant nu avec le jeune assis sur lui. Il place aussi de la glace dans son maillot qu'il lui enlève en se tiraillant pour lui craquer les orteils. Une personne raisonnable pourrait certainement percevoir le contexte sexuel de ces attouchements.»

«Les gestes posés par l'accusé à l'égard des plaignants font fi de leur intimité et portent atteinte à leur intégrité sexuelle. Au lieu de leur demander de se dévêtir pour se baigner dans le spa, il le fait lui-même. Au lieu d'expliquer à X la façon adéquate d'enlever le surplus de peinture, il s'acquitte de la tâche sous prétexte de retourner rapidement à l'école.»

«L'accusé a profité du lien de confiance établi avec ses élèves pour les amener chez lui. Le contexte de jeu n'était qu'un prétexte ou un subterfuge lui permettant de commettre des gestes portant atteinte à leur intégrité sexuelle ou de se livrer à des attouchements à des fins d'ordre sexuel sur leur personne. Je ne crois pas que l'accusé, un homme mature de 51 ans, puisse s'être comporté de la sorte sans arrière-pensées.»