Je me sens aimée, heureuse et bien», a murmuré d'une voix faible Hélène Leduc, qui est retournée pour la première fois mardi entre les murs de la succursale de la SAQ de Baie-D'Urfé, où sa vie a basculé il y a un an.

Ce jour-là, cette employée travaillait seule lorsque deux hommes sont entrés, l'ont forcée à s'agenouiller et lui ont tiré une balle dans la nuque, avant de déguerpir sans rien voler. Un crime gratuit qui l'a rendue tétraplégique, la condamnant à vivre dans un fauteuil roulant, prisonnière de son corps. Seules ses mains et ses épaules bougent. À peine.

Si le drame et l'incompréhension ont marqué sa dernière présence à la petite succursale du boulevard Morgan, c'est une bouffée d'amour qui attendait cette fois la femme de 59 ans.

«Bienvenue, Hélène»

Des employés, clients et membres de sa famille étaient réunis à la succursale, où un buffet était offert. Assise dans son fauteuil au fond de la salle, Mme Leduc contemplait, le sourire aux lèvres, toute l'agitation autour d'elle. «Bienvenue, Hélène, cette journée est pour toi», pouvait-on lire sur une pancarte à ses côtés. «Ce n'était pas difficile de revenir ici. Aujourd'hui, c'était la journée où je rencontrais les gens à qui je pense depuis un an», a-t-elle confié, une fois à l'extérieur. Sa fille Lyndsey venait de lui allumer une cigarette. «C'est honnêtement le seul défaut que j'ai en ce moment», a-t-elle badiné.

Pour ses enfants, la journée a été difficile et a ravivé de douloureux souvenirs. «C'est son idée et sa décision de revenir ici, je ne lui ai pas demandé pourquoi. C'est peut-être sa façon de faire son deuil et ça lui fait du bien, je pense, de revoir ses clients», a raconté sa fille Lyndsey Tessier.

Ce crime gratuit est de toute évidence encore lourd à porter pour les trois enfants de Mme Leduc. «C'est sûr que c'est dur. Ça fait depuis mardi que je suis à l'envers. Ça fait un an qu'elle est dans sa petite chambre. Le plus dur a été de perdre son intimité, son autonomie. Aujourd'hui, elle a l'air heureuse», s'est consolée Lyndsey Tessier.

Les employés semblaient pour leur part très heureux de retrouver Mme Leduc, malgré la charge émotive qui accompagnait ses retrouvailles. «Ça fait un an déjà que les clients demandent des nouvelles d'Hélène», a souligné Josée, qui a travaillé plusieurs années avec la victime. C'est d'ailleurs elle qui a contribué à organiser ce rassemblement. «Mon but était de dire: on ne l'a pas oubliée. Avec un événement comme aujourd'hui, on fait un peu revivre Hélène», a ajouté Josée.

«Une importante annonce»

Le Service de police de la Ville de Montréal poursuit son enquête. Selon le sergent Ian Lafrenière, on pourrait s'attendre à du nouveau prochainement dans ce dossier. «On aurait aimé annoncer quelque chose aujourd'hui, mais on risque de le faire dans les prochains jours ou les prochaines semaines», s'est borné à dire le sergent Lafrenière, manifestement pour des raisons stratégiques.

Vers le milieu de l'après-midi, un autobus de transport adapté s'est garé devant l'entrée de la SAQ de Baie-D'Urfé.

Le rassemblement venait de prendre fin. Mme Leduc, radieuse, est rentrée chez elle.