Les mafieux qui ont recruté la douanière Marilyn Béliveau n'avaient visiblement aucun respect pour elle. À leurs yeux, elle n'était qu'une booze, terme qui désigne une prostituée dans leur jargon.

C'est ce qui ressort des 375 conversations téléphoniques enregistrées dans le cadre de la vaste opération antimafia Colisée, produites en preuve contre l'ex-douanière.

Cinq ans après l'opération Colisée, le procès de Marilyn Béliveau se déroule actuellement au palais de justice de Montréal. La femme de 31 ans est soupçonnée d'avoir participé à deux complots visant à importer de la drogue au profit d'une organisation criminelle en 2005 et en 2006. Ces deux complots ont échoué.

La douanière travaillait au siège social de l'Agence des services frontaliers du Canada à Montréal. Son rôle dans le réseau d'importation de drogue était double, selon la poursuite. Elle aurait donné des conseils aux criminels pour qu'ils puissent importer leur marchandise sans se faire prendre, et elle devait les avertir si les autorités s'intéressaient de trop près à leur marchandise, toujours selon la Couronne.

Un mépris palpable

Lorsque son coaccusé, Rony Bardales, lui parle au téléphone, il prend un ton mielleux. Marilyn Béliveau lui répond sur un ton tout aussi séducteur, révèlent les conversations. Elle lui laisse même des «messages sexy» qui semblent plaire à l'homme de 33 ans.

Or, lorsque Bardales parle d'elle avec les cerveaux des complots, Ray Kanho et Giuseppe Torre, le mépris est palpable. Ils la surnomment la booze, parce qu'elle fréquentait alors des gangsters d'origine haïtiens, qui utilisent ce terme pour désigner une prostituée.

Dans l'une des conversations, Marilyn Béliveau fournit à Bardales un code (RM0001) qu'il doit inscrire sur les paquets de drogue qu'il compte importer afin qu'ils échappent à l'inspection à la douane de Montréal.

Dans une autre conversation, Fritz Dorsainville, à l'époque l'ami de coeur de Béliveau, laisse entendre qu'elle touchera 100 000$ pour son aide. Il en veut une part, soit 20 000$.

On apprend dans d'autres enregistrements qu'elle entretient une relation d'amitié avec Éric Semino, aussi lié aux gangs de rue, qui a été condamné plusieurs fois pour des affaires d'armes à feu.

Marilyn Béliveau, Rony Bardales et Samir Salame sont coaccusés dans cette affaire. Les têtes dirigeantes du complot, Kanho et Torre, ont déjà reconnu leur culpabilité à des accusations similaires et ont écopé de 14 ans de prison. Ils travaillaient pour le compte du clan Rizzuto.