À sa sortie de prison, Benoît Guay, ancien policier qui a agressé sexuellement huit jeunes femmes, s'est mis à fréquenter l'université avec l'approbation de son agente de libération conditionnelle.

Libéré l'hiver dernier, mais toujours considéré comme dangereux, il devait avertir son agente de toute rencontre «non fortuite» avec une femme. Or, en juin, sans en parler à personne, il est allé prendre un café avec une étudiante de 21 ans rencontrée à l'université.

Ce manque de transparence vient de lui coûter sa liberté. Mercredi, au cours d'une audience au Centre fédéral de formation, à Laval, sa libération d'office a été révoquée. «Votre retour en collectivité représente un risque inacceptable», ont tranché les commissaires.

Ressemblance avec les victimes

L'étudiante, mince jeune femme aux cheveux châtain clair, ressemble physiquement aux victimes de Guay, ont relevé les commissaires. Ce manquement est «extrêmement grave» puisqu'il est en lien avec ses crimes, ont-ils conclu.

En juin dernier, la jeune femme, qui avait été bénévole à la maison de transition où a vécu l'ancien policier à sa sortie de prison, l'a croisé dans un corridor de l'université et l'a reconnu.

Ils ont bavardé un peu et ont décidé de poursuivre leur discussion devant un café le lendemain. Durant deux heures, ce vendredi-là, Guay lui a parlé de son passé de «spécialiste de la filature» à la police de Montréal en plus de lui décrire ses crimes.

Selon les conditions de sa libération d'office, l'ancien policier aurait dû parler de ce rendez-vous à son agente de libération conditionnelle. La jeune femme, elle, s'en est vantée à un ami policier. Ce dernier, inquiet, a alerté les autorités.

«J'ai baissé ma garde. Je me suis piégé moi-même», a dit Guay pour expliquer l'incident, mercredi. Cette réponse a visiblement irrité la commissaire Anne-Marie Asselin, qui lui a reproché ses «phrases creuses».

«Si elle avait eu 60 ans, vous ne l'auriez pas invitée à prendre un café. C'est là que ça devient dangereux», a dit la commissaire. Guay lui a répondu qu'il n'avait aucune mauvaise intention et qu'il aurait fait la même invitation à une femme de 60 ans.

«C'est l'histoire de votre vie d'avoir une double vie. Vous avez leurré tout le monde autour de vous, vos collègues policiers, votre conjointe», a ajouté la commissaire d'un ton désapprobateur.

L'ancien policier a été condamné à 8 ans de prison en 2007 pour avoir agressé huit adolescentes et jeunes femmes en 14 mois. Il a menacé certaines d'entre elles avec son arme de service. Mettant à profit ses connaissances acquises à titre de policier, il suivait ses victimes et les emmenait à l'écart pour les agresser.

Motivé par l'université

«Ça ne se reproduira plus jamais», a assuré l'ancien policier aux commissaires. Il jure que la thérapie pour délinquants sexuels qu'il a suivie à l'Institut Philippe-Pinel a porté ses fruits. Il leur a demandé de ne pas le renvoyer en prison puisqu'il avait enfin trouvé sa place à l'université. «J'avais des notes exceptionnelles. J'avais le sentiment de m'accomplir.»

L'ancien policier a eu sa leçon, a dit mercredi son agente de libération conditionnelle, qui estimait que la révocation de la libération d'office n'était pas nécessaire. Les commissaires en ont décidé autrement, et Guay devra rester en prison jusqu'en mai prochain.

En janvier dernier, alors qu'il avait purgé les deux tiers de sa peine, la CNLC l'avait libéré comme le prévoit la loi. Convaincue que Guay avait toujours «un risque élevé de récidive dans des délits de semblable matière, à savoir l'agression de jeunes filles», la CNLC lui avait imposé une série de conditions particulières, dont celle concernant les rencontres «non fortuites» avec des femmes.

Sa peine se termine en octobre 2012. Toutefois, comme le tribunal l'a étiqueté «délinquant à contrôler», il fera l'objet d'une surveillance des autorités jusqu'en 2022.