Les parents de Raymond Ellis, jeune homme sans histoire victime d'un conflit entre deux gangs montréalais, sont à la fois soulagés et anxieux.

Soulagés, parce que le cinquième et dernier des jeunes hommes accusés d'avoir battu à mort leur fils est derrière les barreaux. Anxieux, parce qu'ils devront assister à un nouveau procès dans cette affaire.

John Tshiamala, 25 ans, a comparu hier au palais de justice de Montréal après avoir été arrêté vendredi à Sainte-Thérèse, dans la région des Laurentides. Il était recherché depuis le mois de mars, lorsque la Cour d'appel a ordonné la tenue d'un nouveau procès.

«Nous sommes vieux pour vivre un stress comme celui-là, mais on n'avait jamais perdu espoir. Le bien finit toujours par triompher du mal», a dit hier à La Presse le père de la victime, Raphaël Ellis.

M. Ellis et sa femme, Joyce, avaient assisté au premier procès chaque jour jusqu'à son avortement en janvier 2009. La femme de 72 ans a sombré dans une profonde dépression par la suite. «Même si ce sera encore difficile et que cela ne ramènera pas mon fils à la vie, je dois être là jusqu'au bout pour lui», a-t-elle dit à La Presse.

La libération des cinq présumés meurtriers de Raymond Ellis, poignardé à mort au bar Aria en 2005, en avait scandalisé plusieurs à l'époque. Ellis était un jeune vendeur de vêtements sans histoire, que les Bleus avaient pris pour un membre d'un gang rival. Ses agresseurs - qui commémoraient l'assassinat de l'un des leurs ce soir-là - ne lui avaient donné aucune chance de s'expliquer.

Procès avorté

En janvier 2009, la juge Sophie Bourque a ordonné l'avortement du procès au motif que la Couronne s'était rendue coupable d'abus de procédure. L'histoire est complexe. Après que son témoin-clé, Wilkerno Dragon, eut décidé de ne plus collaborer, le procureur de la Couronne, Louis Bouthillier, a demandé une remise «pour se préparer» à la suite de l'interrogatoire de Dragon. En fait, c'était plutôt pour envoyer deux agents doubles en prison pour qu'ils soutirent des aveux au témoin hostile.

La juge Bourque a reproché à la Couronne ce «faux prétexte», de même que d'avoir présenté une preuve «douteuse» obtenue grâce à un informateur de police. La Couronne a porté cette décision en appel. En mars dernier, la Cour d'appel a cassé la décision de la juge Bourque et ordonné un nouveau procès.

C'est une information provenant du public qui a permis aux policiers de mettre la main au collet de John Tshiamala. Trois autres suspects ont été arrêtés le 11 mars dernier; le quatrième s'était rendu aux policiers. Il ne restait plus que Tshiamala en cavale.

Tshiamala sera détenu jusqu'au procès, dont la date n'a pas encore été fixée. Les quatre autres accusés sont Ernso Théobrun, Evens Belleville, Cleveland Alexander-Scott et McClee Charles. Ils sont tous accusés de meurtre non prémédité.