Lorsque deux enquêteurs se sont présentés chez lui pour la première fois, Claude Larouche leur a dit qu'il ne connaissait pas Natasha Cournoyer.

L'homme de 49 ans a raconté aux policiers qu'il avait entendu parler d'elle dans les reportages sur sa disparition.

Il a été arrêté trois semaines plus tard, le 5 novembre, trahi par son ADN.

Les sergents-détectives Jean-François Pagé et Stephen Abraham, de la division des crimes majeurs du SPVM, ont rencontré Claude Larouche pour la première fois le 16 octobre, 10 jours après la découverte du corps de la femme de 37 ans, a-t-on appris hier.

Cette révélation faisait partie d'une série d'admissions des parties produites en preuve, hier, au procès de Claude Larouche, au palais de justice de Montréal.

La victime aurait été enlevée le 1er octobre 2009 après avoir quitté son travail vers 20h, à Laval. Son corps a été retrouvé le 6 octobre dans un terrain vague à Pointe-aux-Trembles.

Les policiers se sont intéressés à Larouche dès le 16 octobre parce qu'il faisait partie de la liste des clients qui ont séjourné au motel Lido le soir de la disparition de la victime. Ce motel du boulevard des Laurentides est situé non loin de la Place Laval, où travaillait la victime.

Un second élément les intriguait: Larouche possédait une fourgonnette semblable à celle qui avait été observée dans le stationnement de la Place Laval le soir de la disparition. Sur les images captées par des caméras de surveillance, on voit une fourgonnette quitter les lieux peu de temps après que la victime eut traversé le stationnement pour se rendre à sa voiture.

Le 16 octobre, Larouche a invité les policiers à entrer dans son logement, dans le quartier Ahuntsic, où il vivait avec sa conjointe et les deux fils de cette dernière. Les policiers ont préféré l'interroger dans leur véhicule. Il a accepté de les suivre.

Larouche leur a juré qu'il ne connaissait pas Natasha Cournoyer. Il a toutefois reconnu qu'il fréquentait le motel Lido et le motel Idéal, tous les deux situés non loin de la Place Laval, qui «ne coûtent pas cher». Il ne se souvenait pas d'y être allé le soir de la disparition de la victime.

Larouche a également confié aux enquêteurs qu'il vivait de l'insatisfaction sexuelle avec sa conjointe, à qui il cachait ses escapades au motel. Il rentrait toujours à la maison vers 18h, avec des emplettes, pour qu'elle ne se doute de rien. Il a aussi dit aux policiers qu'il était un ancien alcoolique qui n'avait fait aucune rechute depuis cinq ans.

Pour éviter que sa conjointe lui pose des questions, Larouche a donné son numéro de cellulaire aux policiers s'ils avaient à le rappeler.

Le sergent-détective Pagé est retourné chez Claude Larouche le 5 novembre, cette fois pour l'arrêter. La police venait de recevoir du Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale les résultats des analyses d'ADN qui prouvaient que le sperme trouvé dans la bouche de la victime était celui de Larouche.

Ligotée et étranglée

Natasha Cournoyer est morte d'asphyxie par strangulation, a conclu le pathologiste André Bourgault. Avant d'être étranglée, elle aurait reçu huit ou neuf coups au visage, a témoigné le médecin, hier.

Son nez a été fracturé, ce pour quoi il faut «un bon coup avec un objet contondant», a indiqué le Dr Bourgault. La victime avait les yeux enflés. Ses poignets et ses chevilles portaient des marques «lignées», comme si elle avait été ligotée, selon le médecin. D'autres blessures aux joues et aux commissures des lèvres indiquent qu'elle a possiblement été bâillonnée.

En raison de l'«état de conservation médiocre» du corps trouvé dans un buisson d'un terrain vague, le Dr Bourgault a été incapable de préciser le moment de la mort.

La pierre tombale de son père

Louise Cournoyer, mère de Natasha, a parlé à sa fille au téléphone vers 19h le soir de sa disparition. Natasha lui a dit qu'elle finissait de travailler bientôt et qu'elle rentrait chez elle, peut-on lire dans une autre admission produite en preuve.

Les deux femmes avaient prévu déjeuner ensemble le lendemain matin, puis choisir la pierre tombale du père de Natasha. Cette dernière devait d'ailleurs rappeler sa mère le lendemain en quittant son appartement.

Vers 10h le lendemain, inquiète de ne pas avoir de nouvelles, la mère a tenté sans succès de joindre sa fille par téléphone. Vers 16h, le conjoint de Natasha, Michel Trottier, a appelé sa belle-mère pour l'aviser que la voiture de Natasha était restée dans le stationnement de la Place Laval.

«Natasha n'avait pas d'ennemi ni de conflit avec personne. C'était une fille sans histoire», selon sa mère.

La procureure de la Couronne, Me Éliane Perreault, a terminé sa preuve hier.

La défense, représentée par Richard Rougeau et Sonia Mastromatteo, a annoncé aux jurés qu'elle aurait des témoins à faire entendre. Le procès, présidé par le juge Fraser Martin, reprendra donc lundi avec le début de la preuve de la défense. Le magistrat prévoit que, au rythme où se déroule le procès, les délibérations pourraient commencer dans la semaine du 20 juin.