À peine deux jours après l'annonce de la découverte du corps de Jolène Riendeau, les policiers de Montréal ont arrêté vendredi matin un homme de 40 ans soupçonné d'avoir assassiné la fillette de dix ans et demi, disparue en avril 1999.

Il s'agit d'une autre avancée majeure - la deuxième en moins de 72 heures - dans cette mystérieuse affaire qui tenait les policiers en échec depuis 12 ans. Le suspect, bien connu des milieux policiers, a été arrêté à Montréal, vraisemblablement dans le Sud-Ouest. Au moment d'écrire ces lignes, il était toujours interrogé au quartier général de la Division des crimes majeurs. Son interrogatoire risquait de se prolonger très tard puisque les enquêteurs espéraient obtenir ses aveux. «On ne parle pas d'accusations pour le moment, mais on espère vous annoncer plus tard qu'il sera accusé», a indiqué vendredi matin le sergent Ian Lafrenière, du Service de police de la Ville de Montréal. S'il avoue son crime, le suspect risque de comparaître aujourd'hui par vidéoconférence, et lundi au palais de justice de Montréal.

Déterminés à coincer le suspect à tout prix, les policiers font preuve d'une discrétion peu commune dans cette affaire, pour éviter de faire déraper les efforts des enquêteurs. Impossible donc pour l'instant de dévoiler l'identité du suspect et de savoir s'il existe un lien entre lui et la famille de Jolène Riendeau ou s'il s'est retrouvé dans les radars policiers dans le passé.

Pour les mêmes raisons, les policiers n'ont toujours pas indiqué où et quand le corps de la fillette a été retrouvé. Même la famille de la victime a été tenue dans l'ignorance.

Onde de choc

Les policiers montréalais ont créé une onde de choc mercredi lorsqu'ils ont annoncé qu'ils avaient retrouvé le corps de Jolène Riendeau et, du même souffle, qu'ils suivaient une piste sérieuse et avaient un suspect en vue. Selon nos sources, les restes de Jolène Riendeau se trouvaient depuis très longtemps à l'endroit où ils ont été découverts. La fillette de dix ans et demi serait morte dans les heures ou les jours qui ont suivi sa disparition.

Le jour de sa disparition, le 12 avril 1999, Jolène Riendeau venait de préparer le souper avec son père dans leur résidence de la rue de Montmorency, à Pointe-Saint-Charles. Pour la récompenser, son père lui a donné de l'argent pour aller s'acheter des croustilles dans un dépanneur voisin, rue Charlevoix. Elle n'a jamais été revue.

En mai 2005, la police avait entrepris de nouvelles fouilles après qu'un détenu eut confié à son compagnon de cellule qu'il avait tué Jolène et avait jeté son corps dans le canal de Lachine, près de la taverne Magnan. On avait abaissé le niveau de l'eau, inspecté le canal à l'aide d'un échosondeur numérique et des caméras, sans résultat. Au fil des ans, les policiers ont reçu des centaines de renseignements du public - plus de 1500 -, et des millions d'affiches de la disparue ont été placardées aux quatre coins de la province.

Grosse semaine pour les proches

Dire que la semaine est riche en émotions pour les proches de Jolène est un euphémisme. La famille s'affairait à organiser les funérailles de la fillette lorsqu'elle a appris l'arrestation du suspect, vendredi. «On accueille cette nouvelle avec soulagement, mais on essaie de ne pas trop se réjouir avant que des accusations soient portées, pour éviter de se faire de faux espoirs et d'avoir des frustrations ensuite», a indiqué, vendredi, Pina Arcamone, directrice générale de l'organisme Enfant-Retour, qui agit à titre de porte-parole de la famille. La mère de Jolène, Dolorès Soucy, fait du bénévolat pour cet organisme.

Selon Mme Arcamone, la priorité est de récupérer le corps de Jolène pour le conduire enfin à son dernier repos. «En 72 heures, la vie de la famille a basculé. Pour elle qui attendait des développements depuis 12 ans, c'est bouleversant...» a-t-elle indiqué.

Les funérailles devraient avoir lieu la semaine prochaine dans une église de Pointe Saint-Charles. Entre-temps, la mère de Jolène s'adressera probablement aux médias lorsque des accusations seront officiellement portées. «Elle veut remercier les médias pour leur aide au cours des années. Mais c'est difficile pour le moment, les proches veulent vivre leur deuil», a résumé Pina Arcamone. 

Mme Soucy et les siens n'ont jamais cessé de chercher leur fille. Il y a un an, la mère de Jolène avait même pris la tête d'une marche qui soulignait le 10e anniversaire de sa disparition. Mme Soucy allait également porter chaque année des avis de recherche au dépanneur où sa fille a été vue la dernière fois.

Un peu plus tôt cette semaine, après la découverte du corps de Jolène, la famille a dit souhaiter que le responsable se retrouve enfin derrière les barreaux, que la boucle soit bouclée.

Plus que jamais, ce souhait risque enfin d'être exaucé.